C’est au cours d’une brève apparition sur la TCI, la chaine de télévision d’Alassane Ouattara, que Laurent Gbagbo a demandé l’arrêt des combats. Quelques heures avant ces déclarations, il avait été arrêté par les forces pro-Ouattara dans sa résidence d’Abidjan, où il était retranché en compagnie de sa femme et de ses gardes. Il avait été ensuite emmené à l’hôtel du Golf, quartier général d’Alassane Ouattara.
Les partisans de Laurent Gbagbo et ceux d’Alassane Ouattara étaient engagés dans une épreuve de force depuis plus de quatre mois. Une crise née de la contestation des résultats de l’élection présidentielle de Novembre dernier. D’après l’ONU, le conflit a fait environ un million de déplacés. Parmi eux, ils seraient plus de 100 000 à s’être refugiés au Liberia.
Laurent Gbagbo a été président de la Côte d’Ivoire depuis qu’il a été désigné vainqueur de l’élection de 2000. Il est resté au pouvoir suite a la guerre civile de 2002. Un conflit qui avait divisé le pays entre zones rebelles et zones dirigées par le gouvernement.
Il s’était maintenu au pouvoir plus de cinq ans après la fin officielle de son mandat, à la faveur de multiples reports de l’élection présidentielle.
Pour Affoussi Bamba, porte-parole des Forces nouvelles, l'ex-président sera traduit en justice. « Il y a un principe de complémentarité qui veut que ce soit aussi bien la justice ivoirienne qu’internationale qui soient compétentes, mais pour l’heure, il faut savoir que le procureur de la Cour pénale internationale avait été saisi effectivement des crimes qui avaient été perpétrés par Laurent Gbagbo et son camps » a-t-elle. Mme Bamba pense que c’est la justice internationale « qui va se mettre en branle. »
Parlant toujours des poursuites judiciares contre Gbagbo, Philippe Boloquion de Human Rights Watch, à New York, a expliqué que « depuis plusieurs mois maintenant, il a été mis en cause dans des crimes très, très graves, y compris des crimes contre l’humanité, et donc on estime qu’il est maintenant temps pour lui de répondre de ces crimes. »
De son côté, Alain Toussaint, un conseiller de Laurent Gbagbo en France, accuse les forces spéciales françaises d'être à l'origine de l'arrestation du président sortant ivoirien. « C’est l’épilogue d’une longue chasse à courre contre le président Gbagbo ; depuis de longues années, il était dans le viseur des autorités françaises parce qu’il était un chef de l’Etat indocile », a-t-il déclaré. M. Toussaint a dit que le camp Gbagbo demande « des négociations, des discussions avec le chef de la rébellion, Alassane Ouattara.»
Alassane Ouattara « prend les rênes d’un pays déchirés, un pays qui vit une crise depuis la succession du président-fondateur du pays, Félix Houphouet-Boigny, qui est mort en 1993 », relève, pour sa part, Renaldo Depagne, chercheur à International Crisis Group à Dakar.
Après la sécurisation d’Abidjan et le règlement de la crise humanitaire, Ouattara devra gérer « politiquement le pays en accordant à chaque partie de ce conflit quelque chose qui soit à même de calmer les ardeurs des uns et des autres », a-t-il expliqué.
L’attitude de la France durant les quatre mois de crise postélectorale en Côte d’Ivoire est particulièrement scrutée. Christian Bouquet parle d’une « situation délicate parce que c’est l’ancienne puissance coloniale, qui n’est pas forcément populaire, notamment du côté du camp Gbagbo, et qu’il a fallu qu’elle soit extrêmement prudente dans chacune de ses interventions. »