Suite aux attaques de Paris, le texte sur la prolongation de trois mois de l’état d’urgence été adopté à l’Assemblée nationale française jeudi midi, et doit être soumis vendredi au vote du Sénat en vue d'une adoption définitive.
Le parti Les Républicains (LR), principale formation de l'opposition de droite, aurait souhaité une prolongation de six mois de ce régime d'exception.
En réclamant à devant les députés la prolongation jusqu'à fin février de cet état d'urgence, le Premier ministre Manuel Valls a estimé possible des attentats en France avec des "armes chimiques ou bactériologiques". "Il ne faut aujourd'hui rien exclure", a-t-il dit.
Il élargit la marge de manoeuvre des forces de l'ordre pour des assignations à résidence, pour une extension des gardes à vue liées à des présomptions de terrorisme, et en matière de perquisitions.
Les policiers armés en permanence
Six jours après les plus graves attentats qui ont fait 129 tués et 352 blessés, la France affiche son unité mais vit, malgré les affichettes "Même pas peur!" placardées sur l'emblématique place de la République à Paris, dans la psychose évidente de nouvelles attaques.
Les policiers pourront être armés en permanence, y compris hors service, sur la base du volontariat, a annoncé la direction de la police.
Visé par l'assaut mené mercredi avant l'aube par la police antiterroriste contre un appartement à Saint-Denis, dans la banlieue nord, Abdelhamid Abaaoud, surnommé Abou Omar al-Baljiki ("le Belge" en arabe) au sein de l'EI et soupçonné d'être l'organisateur des plus sanglants attentats de l'histoire française, a été tué, a-t-on appris jeudi.
Huit personnes ont été arrêtées, mais Salah Abdeslam, autre suspect-clé, n'en fait pas partie, selon la justice.
Les enquêteurs doivent désormais identifier au moins un deuxième corps retrouvé sur place, sévèrement abîmé par les tirs et explosions.
L’énigme Abaaoud
L' identification de Abaaoud, pose sérieusement question sur le travail des services de renseignements européens, français et belge en particulier : comment Abaoud a-t-il pu se faire un chemin de la Syrie jusqu'à Paris?
Petit délinquant radicalisé parti combattre en Syrie en 2013, où il est devenu tête d'affiche du contingent des jihadistes francophones, Abaaoud s'était déjà illustré fin 2014 par un aller-retour express en Europe à la barbe des services de renseignements, pour y préparer des attentats finalement déjoués. Aller-retour dont il n'avait pas manqué de se vanter à visage découvert dans la propagande du groupe jihadiste.
Son nom avait été évoqué par les services de renseignement américains dans un rapport en mai, qui mettait en garde contre une possible attaque structurée de l'EI en Europe. Le document émettait l'hypothèse qu'Abaaoud avait tenté de faire croire à sa mort fin 2014 sur le front syrien, afin que les autorités belges relâchent leurs efforts pour l'appréhender.
Jeudi, le Premier ministre belge a rejeté les "critiques" dénigrant les services de sécurité belges.
La traque se poursuit également contre Salah Abdeslam, 26 ans, membre présumé du groupe qui a mitraillé vendredi les terrasses de cafés et restaurants parisiens, avec son frère Brahim Abdeslam qui s'est fait exploser.
Il est activement recherché après sa fuite samedi de Paris. Deux complices présumés de cette fuite, Mohammed Amri (27 ans) et Hamza Attou (20 ans), ont été arrêtés à Bruxelles et inculpés par la justice belge pour "attentat terroriste". Un autre jihadiste, non identifié, serait peut-être aussi en cavale.
Quatre kamikazes seulement ont été identifiés jusqu'à présent, tous des Français, âgés de 20 à 31 ans.
Six nouvelles perquisitions en Belgique
Les occupants de l'appartement de Saint-Denis constituaient une quatrième équipe - après les trois équipes ayant mené les attentats de Paris il y a près d'une semaine. Selon la télévision française France 2, qui cite des sources policières, ils se préparaient à frapper le quartier des affaires de la Défense, à l'ouest de Paris, et l'aéroport parisien de Roissy Charles de Gaulle.
Six perquisitions étaient en cours jeudi matin dans la région bruxelloise, dans l'"entourage direct" de Bilal Hadfi, 20 ans, l’un des jihadistes morts au Stade de France, a-t-on appris auprès du parquet fédéral belge.
Ces perquisitions ont lieu dans plusieurs communes de l'agglomération bruxelloise, dont celle de Molenbeek, "dans l'entourage direct de Hadfi, sa famille, des amis", a indiqué à l'AFP un porte-parole du parquet. "C'est un dossier qui existait déjà, suite au départ de M. Hadfi vers la Syrie", a-t-il précisé.
Par ailleurs, une autre perquisition a été menée dans la matinée dans le quartier bruxellois de Laeken, "dans le cadre du dossier Paris", lors de laquelle une personne a été interpellée. Son degré d'implication "reste à voir", a précisé le parquet.
La Turquie expulse six militants présumés de l'EI
En Turquie, six Marocains arrêtés mardi à l'aéroport d'Istanbul, et suspectés d'être des militants de l'EI, ont été expulsés vers le pays d'origine. Ils voulaient se rendre illégalement en Allemagne, en se faisant passer pour des réfugiés, ont affirmé des médias turcs.
A l'étranger, 48 heures après avoir évoqué l'article 47.7 du traité de l'Union européenne - qui prévoit une assistance des Etats membres en cas d'agression -, la France commence à recevoir des signes concrets de ses alliés.
La Grande-Bretagne et la Belgique ont annoncé le déploiement de navires de guerre pour accompagner le porte-avions Charles-de-Gaulle en route pour la Syrie. Le Canada a assuré qu'il resterait un partenaire "fort" de la France contre l'EI.
Depuis dimanche, les chasseurs français ont bombardé à trois reprises les territoires sous contrôle de l'EI en Syrie.
Conséquence inattendue des attentats de Paris et contre l'avion russe dans le Sinaï égyptien, la France et la Russie vont initier une coopération inédite contre l'EI.
Avec AFP