Après des jours d'escalade, et alors que la confrontation entre les deux pays ennemis a dérivé sur le terrain militaire, les Etats-Unis semblent vouloir s'extraire de cette phase à hauts risques.
"Nous sommes dans une période où le risque reste élevé", les menaces n'ont pas "disparu" et "notre mission est de nous assurer que les Iraniens ne fassent pas de mauvais calculs", a déclaré mardi le ministre américain de la Défense par intérim Patrick Shanahan.
Mais les multiples déploiements militaires américains dans la région décidés par Washington, qui met en garde depuis début mai Téhéran en l'accusant de préparer des actes malveillants, ont permis "d'écarter" pour l'instant "le risque d'attaques contre des Américains", a-t-il estimé.
"Notre réponse prudente, je pense, a donné aux Iraniens le temps de réfléchir", a insisté le chef du Pentagone.
Lundi déjà, le président des Etats-Unis avait tempéré l'idée d'une menace imminente persistante. "Nous n'avons pas d'indications qu'ils vont" attaquer des intérêts américains, avait reconnu Donald Trump, au lendemain de l'un de ses avertissements les plus musclés à l'égard de l'Iran, dont il avait promis "la fin officielle" en cas d'agression.
"Il y aura des conséquences douloureuses pour tout le monde s'il y a une escalade contre l'Iran, c'est une certitude", a prévenu en retour mardi le ministre iranien des Affaires étrangères Mohammad Javad Zarif dans un entretien à la chaîne américaine CNN. "Les Etats-Unis jouent un jeu très, très dangereux", a-t-il souligné.
Face au scepticisme provoqué par les accusations américaines, Patrick Shanahan, avec le chef d'état-major Joseph Dunfort et le secrétaire d'Etat Mike Pompeo, doivent informer mardi après-midi les deux chambres du Congrès, à huis clos, sur la nature des renseignements dont ils disposent.
De nombreux élus démocrates soupçonnent le gouvernement, qui a également rappelé dans la précipitation une partie de ses diplomates en poste en Irak, d'exagérer la menace pour provoquer une déflagration avec la République islamique.
- "Une folie absolue" -
Si le milliardaire républicain assure ne pas vouloir d'une nouvelle guerre, et se dit même prêt à dialoguer avec les dirigeants iraniens, certains ténors de son administration, à commencer par son conseiller à la sécurité nationale John Bolton, ont toujours fait partie des faucons partisans d'un changement de régime à Téhéran et de frappes pour empêcher l'Iran de fabriquer la bombe atomique.
"Ce serait une folie absolue pour les Etats-Unis d'être impliqués dans une autre guerre au Moyen-Orient en ce moment", a prévenu lundi le sénateur démocrate Tim Kaine, appelant à privilégier la diplomatie.
Le président démocrate de la commission du Renseignement de la Chambre des représentants, Adam Schiff, l'un des rares parlementaires déjà briefés la semaine dernière sur la menace iranienne, n'avait pas publiquement mis en doute la crédibilité des éléments qui ont justifié, côté américain, la récente escalade. Mais il avait, lui aussi, accusé l'administration Trump d'avoir "considérablement renforcé les tensions avec l'Iran" en quittant l'accord sur le nucléaire, en multipliant les sanctions et en inscrivant les Gardiens de la révolution, l'armée idéologique de la République islamique, sur la liste noire américaine des organisations terroristes.
"Ce que je veux, c'est souligner la crédibilité du renseignement", a assuré mardi le ministre de la Défense. "Nous avons parlé de menaces et il y a eu des attaques", a-t-il dit, en référence aux récents "actes de sabotage" non revendiqués contre quatre navires dans le Golfe, dénoncés par les Emirats arabes unis et l'Arabie saoudite.
Interrogé lors de l'émission radio du journaliste conservateur Hugh Hewitt sur ces mystérieux "sabotages", Mike Pompeo a pour la première fois évoqué clairement une responsabilité iranienne.
Si l'administration Trump n'est pas encore parvenue à "une conclusion définitive", "à la lumière de tous les conflits régionaux de la dernière décennie et de la forme de ces attaques, il semble assez probable que l'Iran soit derrière", a-t-il déclaré, parlant également d'une attaque de drone contre un oléoduc iranien, revendiquée par les rebelles yéménites soutenus par Téhéran.