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Les initiateurs de la contestation jugés pour trouble à l'ordre public


Une route barrée à Cosa dans la banlieue de Conakry, Guinée, le 14 octobre 2019. (VOA/Zakaria Camara)
Une route barrée à Cosa dans la banlieue de Conakry, Guinée, le 14 octobre 2019. (VOA/Zakaria Camara)

Les principaux initiateurs des manifestations contre un éventuel troisième mandat du président Alpha Condé en Guinée, qui ont fait au moins six morts depuis lundi, ont comparu mercredi devant la justice, au troisième jour consécutif du quadrillage de Conakry par les forces de l'ordre.

Le procès des huit responsables du Front national pour la défense de la Constitution (FNDC), une coalition rassemblant des partis d'opposition, des syndicats et des membres de la société civile, s'est ouvert devant le tribunal de première instance de Dixinn, un quartier de Conakry, placé sous haute protection, selon des correspondants de l'AFP.

Le FNDC milite avec virulence contre un projet de révision de la Constitution, évoqué par le pouvoir, qui permettrait à Alpha Condé, 81 ans, de se présenter fin 2020 pour un troisième mandat. Leur nombre est actuellement limité à deux.

Dans une atmosphère tendue, les prévenus ont dénoncé des traitements inhumains et dégradants au cours de leur garde-à-vue, notamment le fait d'avoir été confinés dans des cellules exigües ou d'avoir été mis à nu.

Les huit hommes sont jugés pour avoir tenu des propos de nature à troubler l'ordre public en appelant à manifester, selon l'accusation, alors que la capitale et plusieurs autres villes ont été en proie lundi et mardi à des heurts meurtriers et que les forces de sécurité restaient très visibles, barrant l'accès à certaines axes de Conakry.

Les prévenus avaient été interpellés samedi au domicile du coordinateur du FNDC, l'ancien ministre Abdourahmane Sanoh.

Leur avocat, Salifou Béavogui, s'attend à ce que ses clients soient "punis", a-t-il dit à l'AFP pendant l'une des nombreuses interruptions de l'audience de la matinée. Il escompte un jugement plus tard dans la journée.

- Poursuivre le combat -

Ils encourent selon lui des peines allant de 3 à 5 ans de prison. "Nous allons plaider non-coupable", a-t-il souligné, en ajoutant que l'accusation avait été "mise en déroute" car elle n'a "pas pu apporter la preuve" que ses clients avaient commis des "actes et manoeuvres" de nature à troubler l'ordre public en appelant à des manifestations pacifiques.

Affrontements en Guinée entre manifestants et les forces de sécurité
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Interrogé en premier, M. Sanoh "ne reconnaît pas les faits", a ajouté l'avocat.

Le chef de l'opposition politique, Cellou Dalein Diallo, a exigé l'abandon des poursuites. "Les innombrables intimidations du pouvoir doivent cesser, elles ne nous feront pas abandonner le combat pour la démocratie", a-t-il dit sur Twitter. Des procès similaires se tenaient dans le même temps dans d'autres villes du pays, selon des sources judiciaires et proches du FNDC.

Des heurts ont agité Conakry et plusieurs villes depuis lundi, faisant au moins six morts parmi les manifestants, tués par les forces de l'ordre, selon des proches et des médecins.

Un jeune homme de 23 ans a été "tué par balle" mercredi matin à Yattaya, dans la grande banlieue de Conakry, a affirmé à l'AFP Me Béavogui, en précisant en avoir été informé par la mère de la victime présumée.

- Inquiétude de l'ONU -

Le gouvernement assure que les forces de sécurité ne font pas usage d'armes à feu et a confirmé seulement la mort d'un habitant de Conakry et d'un gendarme.

Ces tensions alarment l'ONU, inquiète d'une escalade dans un pays pauvre malgré ses importantes ressources minières, à la stabilité incertaine, coutumier des protestations et des répressions extrêmement violentes.

Sans dévoiler explicitement ses intentions, M. Condé a lancé en septembre des consultations sur la Constitution. Il s'exprimera "le moment venu", dit la présidence. Ses desseins ne font aucun doute pour ses adversaires, qui dénoncent les consultations comme une "mascarade".

Malgré l'arrestation de ses responsables et le sang versé, le FNDC a appelé sur les réseaux sociaux à continuer à manifester "jusqu’à l'abandon total du projet de troisième mandat".

Le gouvernement affirme que la mobilisation est illégale, faute de déclaration officielle préalable. Il justifie l'intervention des forces de l'ordre et les multiples arrestations d'opposants par les atteintes à la sécurité publique.

En réalité, estiment les défenseurs des droits humains, la répression prolonge le durcissement du régime observé depuis des mois en même temps que se cristallisait l'idée d'un troisième mandat.

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