Selon l'organisation de défense des droits de l'homme, nombre des Somaliens vivant dans le camp de Dadaab, le plus grand du monde avec 263.000 réfugiés fin août, n'ont accepté le principe d'un retour dans leur pays que parce qu'ils craignaient d'être expulsés de force.
Le gouvernement kényan a annoncé en mai son intention de fermer d'ici novembre ce tentaculaire complexe, situé près de la frontière somalienne, qui accueille depuis 1991 des Somaliens fuyant la guerre civile chez eux.
Les autorités kényanes avaient justifié cette décision par des raisons de sécurité nationale, affirmant que Dadaab est un "sanctuaire" des rebelles islamistes somaliens shebab, qui ont mené plusieurs attaques sanglantes contre le Kenya ces dernières années.
Ces accusations sont contestées par des observateurs indépendants et les réfugiés eux-mêmes, qui disent fuir les violences commises par les shebab.
Lors d'une visite dans le camp en août 2016, HRW a parlé à des réfugiés qui dénoncent les intimidations dont ils disent être victimes de la part de l'administration kényane.
Ils regrettent aussi l'absence d'information de la part du Haut commissariat aux réfugiés au sujet de toute solution de rechange qui leur permettrait de rester au Kenya, ainsi que sur la situation sécuritaire en Somalie.
"Les autorités kényanes ne donnent pas aux réfugiés somaliens un choix réel entre rester et partir. Et l'agence aux réfugiés de l'ONU ne donne pas aux gens d'information précise sur les conditions de sécurité en Somalie", déplore Bill Frelick, directeur du programme réfugiés de HRW.
"Ces retours ne peuvent en aucun cas être considérés comme volontaires", ajoute-t-il.
La fermeture de Dadaab est censée s'inscrire dans le cadre d'un "accord tripartite" signé en 2013 entre les gouvernements kényan et somalien, destiné à faciliter le retour volontaire des réfugiés somaliens.
HRW rappelle que la convention de 1951 relative au statut des réfugiés interdit l'expulsion d'un réfugié "de quelque manière que ce soit" vers un endroit où sa vie et sa liberté sont menacées.
Le rapatriement ne peut être considéré comme volontaire que si les réfugiés ont authentiquement le libre choix de rentrer et sont pleinement informés de la situation dans leur pays.
HRW, qui a interviewé une centaine de réfugiés et demandeurs d'asile à Dadaab, estime qu'aucune de ces conditions n'est actuellement remplie.
Ceux-ci ont peur de retourner en Somalie mais craignent aussi d'être arrêtés et expulsés s'ils restent à Dadaab, résume l'organisation, qui observe que de nombreux Somaliens rentrés dans leur pays sont depuis revenus au camp.
Le gouvernement kényan a réagi en dénonçant des "mensonges" et en accusant HRW de se servir de la cause des réfugiés pour obtenir des fonds.
"Le rapport est rempli de mensonges, avec pour seul but de récolter de l'argent en utilisant la crise des réfugiés, qui ne vont pas en bénéficier", a déclaré le porte-parole du ministère de l'Intérieur, Mwenda Njoka.
"Il est totalement faux de dire que le gouvernement kényan force les réfugiés à retourner dans leur pays. Nous travaillons avec le HCR et le gouvernement somalien pour les faire rentrer dans endroits plus sûrs de Somalie", a-t-il affirmé.
Les shebab, qui ont juré la perte du gouvernement somalien, contrôlent toujours de vastes zones rurales d'où ils mènent des opérations de guérilla et des attentats-suicide, souvent jusque dans la capitale Mogadiscio.
Avec AFP