A peine huit mois après son arrivée aux commandes, l'entraîneur de l'équipe des dragons Gao Hongbo a dû présenter sa démission mardi soir après une nouvelle défaite 2-0 face à l'Ouzbékistan en qualifications au Mondial-2018 en Russie.
Un revers qui plombe fortement les chances de l'équipe nationale de participer à la phase finale du prochain Mondial, phase pour laquelle elle ne s'est qualifiée qu'une seule fois, en 2002, sans d'ailleurs parvenir à marquer un seul but. Le président Xi Jinping, grand amateur de foot, a pourtant promis de tout faire pour que la Chine participe à la compétition, l'organise un jour sur son sol, et remporte le trophée.
Mais même la presse chinoise, qui préfère d'ordinaire passer sous silence les faiblesses nationales, semble perdre patience.
- 'Tout reprendre à zéro ?' -
"Le football chinois doit-il tout reprendre à zéro?", s'interrogeait mercredi le très officiel Quotidien du Peuple, l'organe du Parti communiste au pouvoir, dans une tribune publiée sur son site. L'argent déversé à flots en faveur du football ne fait que dissimuler des lacunes profondes, donnant à croire à des progrès alors "qu'on ne fait que du surplace ou, au pire, on régresse", poursuit le texte.
Soucieux de complaire aux autorités, les grands groupes chinois ont investi des fortunes pour acheter des clubs européens ou des joueurs invités à participer aux matchs de la Super League chinoise (CSL).
Mais le China Daily met en garde jeudi contre ces débauches d'argent, appelant les entreprises chinoises à "investir avec prudence dans le football européen".
"On fait les gros titres avec l'argent dépensé pour attirer des stars étrangères vers la CSL et pour racheter des clubs mais tout cela n'a rien à voir avec le sort de l'équipe nationale sur les terrains de foot", observe Mark Dreyer, un spécialiste du monde sportif basé à Pékin.
"Pour dire les choses simplement, les joueurs chinois ne sont pas assez bons pour se qualifier pour une Coupe du monde et aucun entraîneur n'y peut rien", résume M. Dreyer. L'insistance du gouvernement à participer au Mondial "ne fait qu'accroître la pression sur les joueurs et sur les dirigeants", ajoute-t-il.
- Les ingrédients de la réussite -
Les supporters comme les dirigeants chinois doivent se résigner à traverser encore au moins une décennie de résultats décevants, estiment les spécialistes. Dans le classement Fifa, la Chine arrive juste après St Kitts et Nevis, une île des Antilles 27.000 fois moins peuplée qu'elle.
Début mars, le gouvernement a publié une ambitieuse feuille de route pour placer la Chine "au sommet du football mondial d'ici 2050". En quatre ans, 20.000 académies de formation doivent être créées et quelque 30 millions d'élèves devront pratiquer ce sport, dans le but d'atteindre les 50 millions d'adeptes du ballon rond d'ici 2020.
De Pékin jusqu'au Xinjiang, dans l'extrême ouest du pays, les écoles ont mis le football au coeur du programme sportif. Mais les parents ont plus tendance à pousser leurs enfants à réviser leurs leçons plutôt qu'à faire du sport, dans un pays au système scolaire ultra-compétitif.
La Chine a pourtant tous les ingrédients de la réussite, observe Marcus Luer, patron de l'agence de marketing Total Sports Asia: "Des ressources humaines infinies, de l'argent, de la volonté politique et des sportifs qui en veulent".
Reste à savoir comment gérer tout cela. "Si l'on parvient à intégrer ces éléments dans une structure idoine, il y aura des résultats", pronostique M. Luer. "Cela prendra du temps, de la patience et de l'argent. En sport, il faut normalement compter au moins 10 ans de planification méthodique avant d'assister à un vrai retournement", prévient-il.
Avec AFP