Le Congo-Brazzaville a importé en toute discrétion quelque 500 tonnes d'armes d'Azerbaïdjan, révèle une enquête publiée avant l'élection du 21 mars dans ce pays d'Afrique centrale où le président Denis Sassou Nguesso, 77 ans dont 36 au pouvoir, sollicite un nouveau mandat.
Au total l'Azerbaïdjan a livré des armes à au moins 17 reprises depuis 2015 au Congo-Brazzaville, indique l'étude de l'OCCRP (Organized crime and corruption project), qui se présente comme "un groupement de journalistes d'enquête fondé en 2006".
La dernière livraison daterait de janvier 2020: "Plus de 100 tonnes d'armement ont été envoyés depuis l'Azerbaïdjan à la garde républicaine du Congo-Brazzaville, dont 775 obus de mortier, et 400 caisses de roquettes".
Ce dernier transfert d'armes "a suscité l'inquiétude chez les opposants" qui pensent "que Sassou Nguesso se prépare à utiliser la force si nécessaire pour se maintenir au pouvoir à l'approche des élections du 21 mars".
"Au moins deux envois livrés entre 2015 et 2018 ont été parrainés par l'Arabie saoudite, à un moment où Riyadh examinait la candidature du Congo-Brazzaville à l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP)", lit-on dans les colonnes du quotidien sud-africain Mail and Guardian, qui fait partie du consortium OCCRP.
Pays d'Afrique centrale producteur de pétrole d'environ cinq millions d'habitants, le Congo-Brazzaville est dirigé depuis 1979 par l'ancien officier Denis Sassou Nguesso, à l'exception d'une parenthèse de cinq ans (1992-97).
Lors de la dernière présidentielle en 2016, la réélection contestée de M. Sassou Nguesso avait provoqué une rébellion dans la région du Pool au sud de Brazzaville, fief de l'opposition.
La riposte militaire du régime et la poursuite à huis-clos des rebelles avaient provoqué quelque 140.000 déplacés internes, jusqu'à un cessez-le-feu annoncé par les autorités en décembre 2017 avec les rebelles du pasteur Ntumi.
"Des figures de l'opposition affirment que des livraisons d'armes en provenance d'Azerbaïdjan ont été utilisées pour alimenter la brutale offensive post-électorale de 2016, qui a conduit à une crise humanitaire", d'après l'étude du consortium de journalistes d'investigation OCCRP.
Ces livraisons d'armes ont été faites en toute discrétion. Le Congo-Brazzaville "n'a fait état d'aucune livraison d'armes depuis trois décennies", selon l'enquête. Le pays n'est pas sous le coup d'un embargo, et n'a donc pas l'obligation de déclarer ses importations d'armes.
L'OCCRP affirme avoir obtenu des "plans de vol" et des "inventaires d'armes" pour documenter son enquête.
Le coût de la dernière livraison d'armes de janvier 2020 a été évalué à 10 millions de dollars par un expert.
Les autorités de Brazzaville n'ont pas répondu aux questions du rapport tout comme celles de Bakou sollicitées par l'AFP.
L'ambassade du Congo en France n'était pas non plus joignable vendredi matin.
Frappé par la chute des prix du pétrole, le Congo-Brazzaville lourdement endetté est parvenu à un accord avec le Fonds monétaire international (FMI) en juillet 2019.
Au total sept candidatures ont été validées pour le scrutin du 21 avril dont celle du président Sassou Nguesso et de l'opposant Guy-Brice Parfait Kolélas, arrivé deuxième à la présidentielle de 2016.
A un mois de l'élection, l'ambiance à Brazzaville est moins tendue qu'en 2016. Il y a cinq ans, le scrutin avait été précédé d'une réforme très contestée de la Constitution permettant au président Sassou Nguesso de se représenter.