Des dizaines de personnes soupçonnées de crimes de guerre et de crimes contre l'humanité sont toujours en liberté en Centrafrique, pays en proie à des combats entre des rebelles et l'armée, a déploré mercredi Amnesty International.
Dans un communiqué, l'ONG regrette que "sur les 25 mandats d'arrêt décernés jusqu'à présent" par la Cour pénale spéciale (CPS) de Centrafrique, "un seul a été exécuté, aboutissant à l'arrestation (...) du ministre Hassan Bouba Ali".
Mais même celui-ci a été "libéré quelques jours plus tard par les autorités centrafricaines, en dehors de toute décision judiciaire", poursuit Amnesty International.
Ex-chef rebelle devenu ministre de l'Elevage, Hassan Bouba Ali est soupçonné par l'ONG américaine The Sentry d'être responsable de l'attaque d'un camp de déplacés en novembre 2018 à Alindao, 500 km à l'est de Bangui, qui s'était soldée par la mort d'au moins 112 villageois dont 19 enfants.
Accusé de crime contre l'humanité, il avait été arrêté le 19 novembre mais exfiltré de sa prison par des gendarmes une semaine plus tard. Le 29 novembre, il a été décoré de l'ordre national du mérite par le président Faustin Archange Touadéra.
La CPS est une juridiction hybride, composée à parité de magistrats centrafricains et internationaux, chargée de juger à Bangui les violations graves des droits humains commises depuis 2003.
La Centrafrique, considérée comme l'un des pays les moins développés au monde par l'ONU, est le théâtre depuis 2013 d'une guerre civile d'abord très meurtrière mais qui a considérablement baissé d'intensité après 2018, même si des pans entiers de territoires continuent d'échapper au pouvoir central de Bangui.
Amnesty International a également dénoncé un "manque de soutien des autorités politiques pour la mission de la cour".
L'ONG a appelé les autorités politiques et l'ONU à "faire en sorte que tous les responsables présumés de crimes de droit international (...) soient soumis à de véritables enquêtes et jugés dans le cadre de procès équitables".
"La grande majorité des victimes attend toujours justice, vérité et réparations", poursuit l'organisation de défense des droits humains.
En octobre, le ministre centrafricain de la justice avait reconnu une partie des accusations formulées par l'ONU notamment sur des crimes et actes de torture, commis "majoritairement" par des rebelles, mais aussi par des soldats et leurs alliés "instructeurs russes".