Dans la cour de l’école primaire de Bassoundi située au centre-ville de Fada, des groupes d’élèves s'amusent. Parmi eux, certains ont dû fuir les écoles de leur village pour se retrouver.
C’est aux enseignants qu’échoit la mission de les insérer dans ces moments difficiles, explique Ismaël Nadjoari, enseignant titulaire de cette école.
"Rien que dans la commune de Matiacoali, il y a plus de 200 élèves qui ont été déportés à Fada, éparpillés dans les écoles. Dans ma classe, précisément, il y en a trois et au total, nous avons sept élèves venus de la commune de Matiacoali".
Matiacoali est une des communes de la province du Gourma où les terroristes ont instauré la psychose au sein des habitants. Depuis des mois, les écoles se ferment, les unes après les autres, comme ce fut le cas ici à Namoungou. Le seul bruit d’une moto provoque la hantise, assure ce responsable sous couvert d’anonymat.
"A Namoungou, les enfants ne viennent même pas à l’école. Ça reprend peu à peu mais pas comme avant. Même si on est en classe et puis on entend des bruits de motos, on a le regard tourné vers l’avant parce que ça peut être les mêmes individus qui reviennent", indique-t-il.
C’est ainsi la psychose dans toute la région. "Plus rien ne marche comme avant", soupire le maire adjoint de la commune de Fada N’gourma, Fadel Thiombiano.
"Nous avons un certain nombre de bailleurs qui se voient un peu réduire leur champ d’action dans la région pour ces mesures sécuritaires. On avait affaire à des bandits qui avaient peur de l’arrivée des forces de sécurité. Nous avons aujourd’hui des gens qui sont en mesure d’utiliser des armes de guerre, des explosifs, et qui sont prêts à affronter les forces de défense", explique M. Thiombiano.
Plusieurs enseignants ont reçu l’injonction des terroristes d’enseigner l’arabe en lieu et place du français, précise le professeur Ismaël Nadjoari.
"Nous sommes dans une situation où tout le monde est désemparé, élèves, parents d’élèves, enseignants, donc à tout moment chacun se dit qu’il peut être victime de la situation. Personne n'est dans la quiétude", témoigne-t-il.
De nombreuses écoles ont été brulées dans la région par des terroristes présumés.
"Les zones où les écoles sont brûlées, c’est essentiellement à la Komandjari. Il y a quelques cas résiduels vers la Kompienga et vers la Tapoa. Les écoles se ferment même s'il n’y a pas de dégâts parce que les gens -quand ils apprennent ce qui s’est passé à la Komandjari et qu’ils apprennent qu’il y a des bandits qui sont venus tourner autour d’une école- ça crée une certaine panique et les enseignants demandent à leurs enfants de ne pas aller à l’école parce qu’on ne sait pas ce qui va se passer", explique le colonel Ousmane Traoré, gouverneur de la région de l’Est.
C'est une situation fâcheuse pour laquelle des stratégies sont en cours, rassure le maire adjoint Fadel Thiombiano: "Des rencontres stratégiques se mènent autour des premières autorités, dans le but de voir comment rassurer le personnel du cadre enseignant afin de pouvoir continuer les services".
Depuis l’intensification des attaques terroristes au Burkina Faso, environ 600 à 700 écoles ont dû fermer sur l’ensemble du pays en raison des risques encourus par les enseignants et les élèves.