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L'opposition dénonce une réforme constitutionnelle renforçant les pouvoirs du président au Tchad


Idriss Deby Itno, président de la République du Tchad, à N'Djamena, le 19 mars 2018. (VOA/André Kodmadjingar)
Idriss Deby Itno, président de la République du Tchad, à N'Djamena, le 19 mars 2018. (VOA/André Kodmadjingar)

Le prochain passage à un "régime présidentiel intégral", pilier d'une nouvelle 4e république, va renforcer les pouvoirs du président du Tchad dirigé depuis 1990 par Idriss Déby Itno, une perspective dénoncée par l'opposition.

"On revient à la Constitution de 1962 où le président est chef de l'Etat, chef du gouvernement et où il doit présenter son gouvernement devant l'Assemblée nationale", souligne un constitutionnaliste tchadien sous couvert d'anonymat.

Il n'y aura donc plus de Premier ministre, et la création d'un poste de vice-président un temps envisagée n'a pas été approuvée par les 700 participants à un forum sur les réformes institutionnelles qui vient de s'achever mardi à N'Djamena, boycotté par l'opposition.

Les résolutions adoptées à l'issue de ce forum de huit jours seront prises en compte pour la révision de la Constitution de 1996, promesse électorale de 2016 du candidat Déby, et le passage à la 4e république.

>> Lire aussi : Vers un "régime présidentiel" au Tchad

Elles devront d'abord passer - à une date indéterminée - devant un comité de juristes avant d'être adoptées par voie référendaire ou par voie parlementaire, selon Mbaississem Koulayo, directeur des affaires juridiques à l'Assemblée nationale.

Le mandat du président passera de 5 à 6 ans, renouvelable une fois, alors que son mandat est actuellement de 5 ans, renouvelable indéfiniment. Idiriss Déby en est à son cinquième mandat, qui s'achèvera le 21 août 2021.

"La future Constitution entrera certainement en vigueur avant la fin du mandat du président" en août 2021, estime M. Koulayo.

Elle permettrait donc au président Déby, âgé de 65 ans, de se représenter s'il le décidait: il pourrait alors théoriquement effectuer deux autres mandats de six ans, jusqu'en 2033.

La réforme des institutions prévoit en outre que la Cour des comptes, le Conseil constitutionnel et la Haute cour de justice deviennent des chambres de la Cour suprême.

"Pouvoir sans partage"

"Quelques apparences restaient, maintenant c'est un pouvoir sans partage", fulmine l'opposant Saleh Kebzabo, arrivé deuxième à la présidentielle de 2016. Le président "n'a plus le contre-pouvoir du Conseil constitutionnel, il n'a plus de compte à rendre à l'Assemblée nationale, donc il gère le Tchad comme il l'entend", ajoute-t-il.

>> Lire aussi : Forum national inclusif sur les réformes institutionnelles au Tchad

Des observateurs notent cependant que certains contre-pouvoirs seront renforcés: ainsi, "les juges ne peuvent plus être désignés mais seront élus", souligne Mbaississem Koulayo.

Dans ses conclusions, le forum a également préconisé un renforcement de la place des femmes dans la vie politique tchadienne, pour "passer progressivement du principe actuel de quota à une parité intégrale", selon le président Déby. La journée de la femme du 8 mars sera chômée et payée.

Ces réformes paraissent très éloignées des préoccupations de la majorité très pauvre des 14 millions de Tchadiens qui n'a pas bénéficié de la manne pétrolière du début des années 2000. Le pays est toujours classé parmi les plus miséreux au monde, selon l'Indice de développement humain (IDH) de l'Onu.

Cet immense pays d'environ 1,3 millions de km2 en partie désertique, est frappé par une crise économique consécutive à la chute des cours du baril en 2014. De nouvelles mesures d'austérité imposées par le gouvernement début 2018, ont encore renforcé la grogne sociale.

Le Tchad sort de deux mois de grève de la fonction publique et les tentatives de manifestations sont dispersées sans ménagement par les forces de l'ordre.

Avec AFP

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