"Il est établi que la présidente du Parlement a les pouvoirs constitutionnels d'ordonner qu'un vote de défiance contre le président de la République d'Afrique du Sud soit mené à bulletins secrets", a déclaré le président de la Cour constitutionnelle, Mogoeng Mogoeng.
Plusieurs partis d'opposition avaient déposé une requête pour réclamer un tel vote après un remaniement ministériel controversé fin mars où Jacob Zuma avait nommé une dizaine de ses fidèles à des postes-clés.
Pour qu'elle soit entérinée, la défiance contre le chef de l'Etat doit être approuvée par 201 députés sur les 400 que compte le Parlement. Le Congrès national africain (ANC), au pouvoir, y possède une confortable majorité absolue de 249 sièges.
L'opposition est néanmoins persuadée de pouvoir "retourner" plusieurs députés de l'ANC contre le président Zuma s'ils n'ont pas la pression d'un vote à main levée.
Selon le Mouvement pour une Union Démocratique, le parti à l'origine de la procédure judiciaire, cette décision de la Cour reconnaît "le risque sérieux" des menaces qui planent sur les députés ANC tentés de voter contre M. Zuma.
"C'est une victoire pour le peuple sud-africain en vue de dégager un président toxique qui détruit notre pays", s'est immédiatement réjoui James Selfe, un élu du principal parti d'opposition, l'Alliance Démocratique.
Aucune date n'a pour l'heure été fixée pour l'organisation du vote de défiance.
La décision reste de toute façon dans les mains de Baleka Mbete, jusque-là loyale au président Zuma, et qui peut toujours choisir d'organiser le vote à main levée.
"Le fait que le vote soit mené à bulletins secrets est une décision qui reste catégoriquement entre les mains de la présidente du Parlement", a précisé Mogoeng Mogoeng.
En avril, Mme Mbete avait d'ailleurs refusé d'envisager ce vote à bulletins secrets, estimant que la Constitution ne l'autorisait pas. C'est ainsi que l'affaire avait atterri devant la Cour constitutionnelle.
"Je ne vois pas de raison de changer (les règles). Vous essayez d'avoir une majorité que vous n'avez pas en parlant de bulletins secret", a réagi le président Zuma lors d'une session de questions-réponses devant le Parlement.
"Vous pouvez essayer de faire ce que vous voulez devant la justice mais ils vous rappelleront les règles de la législature", a-t-il ajouté.
Contrôle des troupes
Outre son remaniement controversé, Jacob Zuma est empêtré dans plusieurs scandales de corruption.
En octobre dernier, la médiatrice de la République de l'époque, Thuli Madonsela avait publié un rapport explosif où elle décrivait par le menu l'implication de la puissante famille d'affaires Gupta dans la gestion des affaires de l'Etat et leurs pressions pour obtenir des contrats publics.
Des échanges confidentiels par courriels, dévoilés dans la presse fin mai, accusent notamment les Gupta d'avoir touché près de 370 millions d'euros lors de la signature d'un contrat entre Transnet et une entreprise chinoise pour l'achat de locomotives.
Et si les affaires autour du président irritent l'opposition, qui réclame régulièrement sa démission, elles ont également créé des remous au sein de l'ANC, et exposé les divisions au sein de ce parti.
Mais Jacob Zuma a jusqu'ici réussi à garder le contrôle de ses troupes et l'ANC a toujours soutenu le chef de l'Etat lors des précédents votes de défiance.
"Nous allons repousser cette motion de défiance de l'opposition comme nous l'avons fait quatre fois avec succès par le passé", a martelé jeudi l'ANC dans un communiqué.
Le parti doit élire un successeur à Jacob Zuma à sa tête, en vue des élections générales de 2019.
L'actuel vice-président Cyril Ramaphosa, chef des frondeurs anti-Zuma, fait partie des favoris face à Nkosazana Dlamini-Zuma, l'ancienne patronne de l'Union africaine (UA) qui a le soutien du chef de l'Etat, son ex-mari.
Avec AFP