Le général Gaïd Salah avait réclamé le 2 septembre que la date de la présidentielle devant permettre d'élire un successeur à M. Bouteflika soit annoncée le 15 septembre pour que le scrutin ait lieu avant la fin de l'année, malgré les protestations du mouvement de contestation inédit qui secoue le pays depuis le 22 février.
Les manifestants s'opposent à la tenue rapide d'une présidentielle, n'y voyant qu'un moyen pour le "système" de se maintenir à la tête du pays. Ils demandent le départ des figures au pouvoir, M. Bensalah et le général Gaïd Salah en tête.
"J'ai décidé (...) que la date de l'élection présidentielle sera le jeudi 12 décembre 2019", a déclaré, dans un discours télévisé, M. Bensalah qui, selon la Constitution du pays, ne peut être candidat.
M. Bensalah, qui a signé dimanche le décret pour la convocation du corps électoral, a appelé les Algériens "à contribuer collectivement (...) le 12 décembre prochain, à l'écriture de l'histoire de leur pays et au choix de leur nouveau président".
Le chef de l'Etat par intérim a "exhorté" les Algériens à "la mobilisation pour faire de ce rendez-vous le point de départ du processus de renouveau de la Nation", estimant qu'il était "temps de faire prévaloir l'intérêt suprême de la patrie sur toutes autres considérations".
Le général Ahmed Gaïd Salah s'est récemment dit certain que l'élection se tiendrait rapidement.
La présidentielle pour élire un successeur à M. Bouteflika, initialement prévue le 4 juillet, avait dû être annulée, aucun candidat ne s'étant déclaré, face à l'ampleur de la contestation.
- "Pure formalité" -
Cette convocation était "attendue", c'est le général Gaïd Salah qui "décide, l'intervention du chef de l'Etat par intérim n'étant que pure formalité", estime dans une déclaration à l'AFP, l'universitaire algérien Mohamed Hennad.
M. Hennad ajoute que "l'enjeu de cette présidentielle ne pourra pas être celui du passage vers un système démocratique".
Il parie sur "le maintien des mêmes moeurs politiques avec de nouveaux visages et un peu de sérieux dans la gouvernance".
Vendredi, les Algériens se sont mobilisés pour la 30e semaine consécutive de manifestations pour s'opposer à la tenue rapide d'une présidentielle.
Le mouvement de contestation rejette une élection avec le gouvernement actuel accusé de fraude. Il réclame le démantèlement de l'appareil hérité des 20 ans de présidence Bouteflika avant tout scrutin ainsi que la mise en place d'institutions de transition, ce que refuse le pouvoir.
Selon M.Hennad, l'ampleur des "marches indique bien que les citoyens n'iront pas voter en masse".
Il pense toutefois qu'il y aura certainement des candidats avec lesquels le pouvoir "se serait entendu", sinon "le pouvoir ne se serait pas hasardé" à programmer une autre présidentielle.
- Contre la montre -
Depuis une semaine, les autorités ont lancé une course contre la montre pour respecter le calendrier fixé par Ahmed Gaïd Salah.
Le Parlement vient ainsi d'adopter au pas de charge un nouveau dispositif législatif en vue du scrutin: une loi sur la création d'une autorité "indépendante" chargée des élections et une autre sur la révision de la loi électorale.
Ce dispositif législatif avait été présenté dimanche dernier par l'"instance nationale de dialogue" formée en juillet par le pouvoir et chargée de sortir le pays de la crise en dialoguant avec partis politique, société civile et représentants du mouvement de contestation.
L'ancien ministre de la Justice, Mohamed Chorfi, a pris la tête de l'autorité indépendante chargée d'organiser le processus électoral et de "superviser toutes ses étapes, depuis la convocation du corps électoral jusqu'à l'annonce des résultats préliminaires".
Dans une déclaration à la presse, M. Chorfi a affirmé que l'autorité qu'il préside "oeuvrera pour rendre la parole au peuple afin de décider de son avenir et parachever l'édification de l'Etat".
M. Chorfi a été reçu dans l'après midi par M. Bensalah.
"Le problème n'est pas avec cette autorité, mais avec les pratiques connues depuis l'indépendance en matière électorale. En l'absence d'éthique électorale et (en raison de) la non application stricte de la loi contre les fraudeurs officiels, la fraude continuera à sévir", conclut M.Hennad.
Avec AFP