Le sort des quelque 800.000 personnes - connues sous le nom de "Dreamers" - qui bénéficient actuellement de ce statut, est désormais suspendu à un énorme point d'interrogation. La Maison Blanche a donné au Congrès un délais de six mois pour légiférer, mais un compromis sur l'immigration, sujet qui divise Washington depuis des années, est loin d'être acquis.
M. Trump, qui s'était engagé à aborder ce dossier sensible "avec coeur", n'a pas pris la parole pour expliquer cette décision, laissant son ministre de la Justice Jeff Sessions monter en première ligne.
Mais dans un long communiqué, il a justifié son choix par la nécessité de donner "la priorité" aux travailleurs américains. "Nous devons nous rappeler que les jeunes Américains ont aussi des rêves", a-t-il lancé en référence au surnom donné au bénéficiaires de ce programme.
La décision a immédiatement provoqué une cascade de réactions indignées."C'est une triste journée pour notre pays", a lancé Mark Zuckerberg, fondateur de Facebook, dénonçant une décision "cruelle". Pour le sénateur républicain John McCain, il s'agit d'une "mauvaise approche": les enfants arrivés illégalement avec leurs parents "ne devraient pas être forcés à rentrer dans un pays qu'ils ne connaissent pas".
En l'absence d'avancées législatives, Barack Obama avait, en 2012, mis en place, par décret, le programme Daca (Deferred Action for Childhood Arrivals) afin de faire sortir de l'ombre les enfants arrivés illégalement aux Etats-Unis avec leurs parents, pour la plupart en provenance d'Amérique latine.
- Aucune nouvelle demande examinée -
Dénonçant la décision prise de manière "unilatérale" par l'ancien président démocrate, Jeff Session a estimé qu'elle avait en particulier "privé d'emploi des centaines de milliers d'Américains en permettant que ces emplois soient occupés par des immigrants illégaux".
"Nous ne pouvons accepter tous ceux qui voudraient venir ici, c'est aussi simple que cela", a-t-il déclaré.
A compter de ce jour, aucune nouvelle demande ne sera examinée. Les permis existants, qui portent sur une durée de deux ans, resteront en revanche valables jusqu'à leur expiration.
Quelque 200 personnes s'étaient rassemblées devant la Maison Blanche pour dénoncer, selon les termes de Gustavo Torres, responsable de l'ONG, une mesure qui punit des jeune qui "sont là depuis des années, travaillent, paient leurs impôts et contribuent à l'économie".
Dans le camp républicain, nombre de voix avaient mis en garde depuis plusieurs jours contre la tentation d'effacer d'un trait de plume ce programme emblématique et de mettre à la merci d'une expulsion ces jeunes "rêveurs", dont le surnom fait référence au Dream Act, projet de loi de réforme de l'immigration n'ayant jamais abouti au Congrès.
- Réaction d'Obama ? -
Fait notable, Donald Trump, dont les diatribes enflammées sur l'immigration ont été au coeur de son message de campagne, avait, depuis son arrivée à la Maison Blanche, ouvertement exprimé ses hésitations sur le sort de ces jeunes. "Pour moi, c'est l'un des sujets les plus difficiles qui soit", soulignait-il il y a quelques mois. "Nous adorons les Dreamers", affirmait-il vendredi dans le Bureau ovale.
Une grande partie du monde des affaires, en particulier dans la Sillicon Valley, était vent debout contre une remise en cause de ce décret qui offre aux jeunes --arrivés sur le territoire américain avant 16 ans et n'ayant pas d'antécédents judiciaires-- l'équivalent d'un permis de séjour d'une validité de deux ans, renouvelable.
Cette décision du 45e président des Etats-Unis pourrait pousser son prédécesseur démocrate à donner de la voix.
Lors de sa dernière conférence de presse avant son départ de la Maison Blanche, le 18 janvier, Barack Obama avait affiché sa volonté de rester en retrait mais il avait aussi énuméré les conditions qui pourraient le pousser à sortir de son silence si les "valeurs fondamentales" de l'Amérique étaient menacées.
"Je mets dans cette catégorie les efforts visant à expulser des enfants qui ont grandi ici et qui sont, à tous égards, des enfants américains", avait-il lancé, fustigeant l'idée de punir, pour des raisons purement politiques, "ces enfants qui n'ont rien fait de mal".
Le gouverneur de l'Etat de New York Andrew Cuomo a lui averti par avance qu'il contesterait en justice toute remise en cause de ce programme.