Le directeur général de l’agence Général Express Voyage, était presque sans voix, face aux journalistes le 2 novembre dernier dans le hall du ministère des transports à Yaoundé.
"Je regrette amèrement ce qui nous arrive ces derniers temps, mais j’adresse mes condoléances aux familles des disparus", a-t-il déclaré.
Mal à l'aise devant la meute de journalistes, il a néanmoins semblé sur la défensive, surtout au sujet de la responsabilité de Général Express Voyage, dans l’accident du 23 octobre dernier. Les témoignages affirment que "le chauffeur avait effectué un mauvais dépassement".
"Je me dis que le ministre a pris une mesure conservatoire, afin que nous apportions la preuve de notre innocence dans cet accident mortel", a- t-il souligné avant d’interrompre brutalement l'entretien.
Au terme d'une audience avec le ministre des transports au cours de laquelle, d'autres promoteurs d'agences de voyage ont pris part, la décision de suspension de Général Express Voyage est restée telle qu'elle avait été annoncée le 24 octobre, par un communiqué signé de Edgar Alain Mebe Ngo, ministre des Transports.
Un jour plus tôt, cette agence de voyage était au centre d’un accident de circulation qui a fait officiellement 15 morts sur l'axe lourd Yaoundé- Douala, respectivement, capitale politique et économique du Cameroun.
C’était loin d’être le premier accident impliquant Général Express Voyage. Depuis janvier 2017, les bus de la société ont été cités à sept reprises dans des cas d’accidents de la circulation.
Sur les 117 morts enregistrés au mois d’août sur les routes camerounaises, "12 sont imputés à la société Général Express Voyage", a déclaré le ministre des Transports.
Suffisant pour le ministre des Transports, pour passer à une étape supérieure, sur le cas de Général Express Voyage. Un audit est prévu dès le 6 novembre de la société dans ses agences de Yaoundé, Douala et Bafoussam.
"Dans les brefs délais, j’attends les résultats de cet audit pour dégager les causes de la récurrence des accidents et prescrire les mesures correctives qui s’imposent", martèle M. Alain Mebe Ngo'o, ministre des Transports du Cameroun.
Cependant, le maintien de la suspension de Général Express Voyage, ajouté à l’audit de cette structure, crée encore des dissensions.
Quelques syndicats des Transports ont d’ailleurs menacé de faire grève, avant de suspendre leur mot d'ordre, dans la soirée du 3 novembre, à l'issue d'une concertation à huis clos avec le ministre des Transports.
"Général Express Voyage a plus de 200 bus de transport. Il y a les emplois directs et indirects autour de la société. Que fera t-on des employés pendant ces trois mois ?", s’interroge Augustin Ngangoua, président d'un syndicat des transports, qui relève que cette mesure est hâtive.
La prise de position fustige la ligue camerounaise des consommateurs, par l'entremise de son président, Delors Magellan Kamgaing.
"Nous aurions souhaité que cette société soit interdite d’activité définitivement. Et la sortie des syndicats des Transports est purement corporatiste", pense M Kamgaing.
Le décompte macabre sur les routes du Cameroun interpelle la responsabilité de l'Etat.
"C’est à l'Etat camerounais de construire de bonnes routes, de veiller à la bonne conduite des chauffeurs. C’est l’Etat qui doit lutter contre la corruption sur les axes routiers et s’assurer que les axes soient éclairés", soutient Nya Ndaga Moubitang, homme politique et coordonnateur d’une organisation non gouvernementale sur les droits de l’homme et la démocratie.
Les usagers de la route partagent ce point de vu, et beaucoup suivent le débat en cours avec intérêt, qui pensent que les pouvoirs publics doivent contribuer d'une manière comme d’une autre à sauver les vies humaines sur les axes routiers du Cameroun .
Emmanuel Jules Ntap, correspondant à Yaoundé