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Le candidat du pouvoir fonce vers la victoire, l'opposition conteste les résultats


Mohamed Cheikh El-Ghazouani vote à Nouakchott en Mauritanie le 22 juin 2019.
Mohamed Cheikh El-Ghazouani vote à Nouakchott en Mauritanie le 22 juin 2019.

Le candidat du pouvoir à l'élection présidentielle en Mauritanie, Mohamed Cheikh El-Ghazouani, a revendiqué dimanche une victoire au premier tour, une proclamation confortée au fil des heures par les résultats de la Commission électorale, rejetés d'emblée par l'opposition.

M. Ghazouani s'est déclaré vainqueur à partir des résultats de 80 % des bureaux de vote, au terme d'une veillée électorale dans la nuit de samedi à dimanche en présence du président sortant Mohamed Ould Abdel Aziz.

L'opposition a qualifié cette annonce précoce de "nouveau coup d'Etat" de la part de ces deux anciens généraux, "éternels putchistes" selon elle.

Les Mauritaniens se sont déplacés samedi en nombre pour élire leur président, qui devra préserver la stabilité chèrement conquise par ce vaste pays du Sahel, mais aussi en assurer le développement économique et y faire progresser le respect des droits humains.

Ce scrutin doit marquer la première transition entre deux présidents élus dans ce pays secoué par de nombreux coups d'Etat de 1978 à 2008, date du putsch qui a porté Mohamed Ould Abdel Aziz au pouvoir avant son élection en 2009. Le président sortant ne pouvait se représenter après deux mandats.

Mais les candidats de l'opposition, soit quatre des cinq adversaires de M. Ghazouani, redoutent la perpétuation d'un régime "militaire" et des risques de fraude. Ils se sont engagés à se soutenir en cas de second tour le 6 juillet.

"Le pouvoir a perdu la bataille électorale", a affirmé le militant antiesclavagiste Biram Ould Dah Ould Abeid, lors d'une conférence de presse conjointe avec les trois autres opposants en lice.

Un autre candidat, l'ancien chef de gouvernement de transition (2005-2007) Sidi Mohamed Ould Boubacar, a dénoncé de "multiples irrégularités" qui selon lui "ôtent toute crédibilité" à cette élection, rappelant les griefs de longue date de l'opposition sur l'équité du processus.

"Nous rejetons les résultats de ce scrutin et nous considérons qu'ils n'expriment nullement la volonté du peuple mauritanien", a-t-il dit. L'opposition utilisera "toutes les voies de droit", a-t-il précisé, exigeant leur publication par la Céni "bureau par bureau".

- Incidents dans deux villes -

Les derniers résultats affichés par la Céni, sur près de 98 % des bureaux de vote, accordaient à M. Ghazouani 51,85 % des voix, devant M. Ould Abeid à 18,65 % et M. Ould Boubacar à 17,97 %.

"Nous lançons un appel au peuple mauritanien, un appel à résister dans les limites de la loi à ce énième coup d'Etat contre la volonté du peuple", a déclaré M. Ould Abeid.

Des incidents ont éclaté à la suite des déclarations de M. Ghazouani, en plusieurs endroits de la capitale et à Nouadhibou, (nord-ouest), l'unique province où il ne soit pas arrivé en tête, devancé par M. Ould Abeid.

La police a dispersé les manifestants qui brûlaient des pneus et scandaient des slogans hostiles au pouvoir au moyen de gaz lacrymogènes et de matraques, selon une source de sécurité. Des sources proches de l'opposition ont fait état de blessés.

Le représentant du secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, pour l'Afrique de l'Ouest et le Sahel, Mohamed Ibn Chambas, a félicité dans un communiqué les Mauritaniens "pour la tenue paisible de l'élection présidentielle.

Il a réitéré l'appel de M. Guterres "à résoudre tout litige éventuel" par la voie judiciaire et exhorté "tous les candidats à faire preuve de patience en laissant la Commission électorale conduire le processus électoral".

M. Ould Abdel Aziz a stabilisé la Mauritanie, frappée dans les années 2000 par des attentats jihadistes et des enlèvements d'étrangers, en menant une politique volontariste: remise sur pied de l'armée, surveillance accrue du territoire et développement des zones reculées.

Mais les critiques se focalisent sur les droits fondamentaux, dans une société marquée par des disparités persistantes entre communautés arabo-berbère, haratine (descendants d'esclaves de maîtres arabo-berbères, dont ils partagent la culture) et afro-mauritanienne, généralement de langue maternelle d'ethnies subsahariennes.

La croissance économique, de 3,6% en 2018, bien qu'en amélioration, reste insuffisante par rapport à la démographie, selon un rapport de la Banque mondiale (BM) publié en mai.

La BM salue le rétablissement de la "stabilité macroéconomique", avec des projections de croissance annuelle de 6,2% en moyenne sur la période 2019-2021 mais appelle à lever les obstacles au secteur privé, en premier lieu les difficultés d'"accès au crédit" et "la corruption".

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