Le Social democratic front (SDF), principal parti de l’opposition au Cameroun, a obtenu sept sièges de sénateurs sur les 70 en jeu, lors des élections sénatoriales de nars 2018. C’est loin d’être l’unique cas de débâcle électorale pour l’opposition camerounaise, qui vit un déclin.
L’enseignant et politologue camerounais, Pascal Messanga Nyamding, évoque "des raisons évidentes" qui expliquent ce "déclin progressif" de ce qui devait constituer un contre-poids politique au parti au pouvoir.
"Les leaders de l’opposition se neutralisent au Cameroun", affirme l'enseignant à l’Institut des relations internationales du Cameroun.
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"Vous n’avez qu’à observer l’acharnement de Cabral Libii, un jeune camerounais de 39 ans, initiateur du Mouvement 11 millions d’électeurs, candidat déclaré à l’élection présidentielle, contre Maurice Kamto, lui aussi candidat d’un autre parti de l’opposition, le Mouvement pour la renaissance du Cameroun", souligne-t-il, car, selon lui, "l’opposition camerounaise est éclatée et polarise la méfiance de plus en plus du peuple sur elle", décrie le politologue camerounais Pascal Messanga Nyamding.
Démocratie en perte de vitesse
En 2013, 14 sénateurs élus étaient issus du SDF. Ils avaient d’ailleurs profité du rejet des listes du RDPC, le parti au pouvoir, pour se faire élire.
C’est dans son fief électoral de la région du Nord-ouest, que le SDF a pu obtenir ses 7 sièges actuels. Certains conseillers municipaux du RDPC ont à l’occasion voté en faveur du parti de John Fru Ndi, chairman du SDF.
Ce qui fait croire à Denis Nkemlemo, chargé de la communication du SDF, que "le parti n’est pas en déclin, il peut même battre le RDPC sur l’ensemble du territoire lors des municipales, législatives et l’élection présidentielle".
Cependant, "si les partis de l’opposition ne font que perdre les élections, c’est parce que la démocratie camerounaise est en perte de vitesse. Vous savez que M. Biya est le seul à prendre toutes les décisions majeures en rapport avec les élections au Cameroun", a déclaré M. Nkemlemo à VOA Afrique.
Les membres d'"Elections Cameroon" (Elecam), l’organe chargé de l’organisation matérielle des élections, sont désignés par M.Biya.
"Il en est de même du ministre de l’Administration territoriale qui est très loyal au président de la République", déplore le secrétaire général du SDF, chargé de la communication.
Ce dernier pense que, ces raisons ne peuvent qu’impacter négativement sur les scores des partis de l’opposition.
D’autant plus que "les personnes qui incarnent une nouvelle vision pour le Cameroun, sont dépossédées par l’appareil étatique au service de M. Biya, des moyens financiers et ressources humaines", fustige M. Nkemlemo, du SDF.
Opposition minoritaire
La faible représentation des partis de l’opposition s’est aussi accentuée à l'Assemblée nationale (32 députés sur 180), et au sein des exécutifs communaux sortants.
Deux facteurs jouent en défaveur de l’opposition camerounaise, selon, Maïdadi Seydou Yaya, membre du bureau politique de l’Union nationale pour la démocratie et le progrès (UNDP), un parti d’opposition de la majorité présidentielle.
"Les partis ne sont pas tellement appuyés par le peuple camerounais voilà pourquoi la démocratie n’avance pas dans notre pays. En plus, le pouvoir est en train de tout mettre en œuvre, pour que l’alliance entre partis de l’opposition ne se fasse pas au Cameroun. Puisque c’est l’unique voix pour remporter une élection majeure comme la présidentielle", souligne le militant de l’UNDP.
Opposition unie, une illusion
L’opposition camerounaise apparaît de plus en plus désunie, à quelques mois des élections municipales, législatives et la présidentielle de 2018.
Plusieurs candidats de l’opposition sont désormais déclarés pour l’élection présidentielle (Akere Muna, Josuah Osih, Maurice Kamto, Cabral Libii, Olivier Bilé etc.).
En 2016, Jean Marie Florent Ndzana, un Camerounais résident au Canada, par ailleurs, dissident du MRC, le parti du Professeur Maurice Kamto, avait mis sur pied le mouvement "Alternance 2018".
L’objectif était d’instaurer les primaires au sein de l’opposition au Cameroun. L’idée s’est effondrée d’elle-même à cause "de la conservation des intérêts des principaux leaders de l’opposition", regrette Marie Jeanne Abega, qui a quitté les rangs d'Alternance 2018", il y a un an.
"Nous avons rencontré plusieurs de ces leaders. Il y avait de la réticence, le rejet de l’idée d’une candidature unique de l’opposition. Tout le monde est président de son parti, veut être président de la République et ne souhaite pas abandonner les avantages financiers liés au fait qu’on soit retenu candidat pour l’élection présidentielle", confie à VOA Afrique, Marie Jeanne Abega.
En 1992, l’opposition camerounaise s’était retrouvée en pôle position à l'Assemblée nationale avec 92 députés sur les 180.
Suite à un revirement des députés de l’UPC (union des populations du Cameroun) et du MDR (Mouvement démocratique pour la défense de la république), en faveur du parti au pouvoir, l’opposition camerounaise s’est affaiblie, au grand bonheur du RDPC, le parti au pouvoir.