Et ce candidat plus trumpo-compatible est, d'ailleurs, également appuyé par Sarah Palin, figure du Tea Party qui fut l'une des premières à rejoindre Donald Trump durant la campagne présidentielle.
De quoi troubler l'électeur républicain moyen.
Tout se passe à l'occasion du second tour de la primaire sénatoriale républicaine de l'Alabama, qui aura lieu mardi prochain et dont l'enjeu dépasse largement les frontières de ce petit Etat conservateur du Sud.
Les caciques du parti républicain ont misé sur Luther Strange, 64 ans, nommé en février par le gouverneur local pour occuper ce siège, libéré par le nouveau ministre de la Justice, le temps d'organiser une élection partielle. Le siège avait été libéré par la nomination du sénateur Jeff Sessions comme ministre de la Justice de Donald Trump.
Son adversaire est un magistrat ultra-conservateur controversé, Roy Moore, 70 ans, héros de la droite religieuse qui a construit sa légende en défendant l'usage de la Bible et les dix commandements dans les tribunaux.
Elu deux fois chef du pouvoir judiciaire de l'Alabama, il été sanctionné deux fois par ses pairs pour avoir refusé d'appliquer des décisions de justice, la dernière concernant le mariage homosexuel. Il a été suspendu de ses fonctions il y a un an.
Roy Moore lui-même soutient "bien sûr" Donald Trump, qu'il dit vouloir aider contre les lobbies, les apparatchiks et les modérés qui peuplent le marigot de la capitale fédérale. Les "élites" de Washington "bloquent les projets du président", dit-il.
Mais son identité politique n'est pas parfaitement alignée avec celle du président, qui n'est pas à l'aise sur les questions religieuses et préfère les sujets économiques et sociaux.
Qu'à cela ne tienne, les forces du "trumpisme" ont jeté leur dévolu sur lui pour donner une leçon au parti, et leur lancer un avertissement face à la lenteur des réformes au Congrès.
On retrouve derrière lui Steve Bannon et son site Breitbart, plateforme de l'extrême droite américaine financée par le couple milliardaire Robert et Rebekah Mercer qui, comme d'autres riches conservateurs, mènent une guerre permanente pour imposer leurs candidats et leurs idées à l'establishment républicain.
"C'est typique des batailles des primaires républicaines", décrypte le professeur Robert Boatright, spécialiste des primaires à l'Université Clark. "De grands donateurs veulent faire un exemple, et le choix du candidat importe peu à ce stade", dit-il à l'AFP.
Trump influent?
"Je soutiens le grand Luther Strange car il m'a toujours été loyal et utile!" a tweeté Donald Trump, en référence à la taille imposante du sénateur par interim.
Le milliardaire, depuis qu'il est installé à la Maison Blanche, n'a que peu de patience pour les rebelles et exige une chose de sa majorité parlementaire: de la discipline.
Le président a donc décidé de venir faire campagne pour Luther Strange sur place, vendredi.
La veille, c'est Sarah Palin et Sebastian Gorka, ex-conseiller de la Maison Blanche congédié cet été, qui organisent un meeting concurrent pour Roy Moore.
Donald Trump "est entouré de gens qui n'ont rien à voir avec la victoire du 8 novembre (2016) et avec le vrai programme MAGA", a dit M. Gorka à Breitbart. MAGA est l'acronyme anglais du slogan de campagne de Donald Trump, "Rendre à l'Amérique sa grandeur" (Make America Great Again), devenu cri de ralliement de ces supporteurs.
A Washington, la pole position du juge Moore dans les sondages crée la panique. Il domine avec 44% d'intentions de vote contre 35% pour Luther Strange, selon la moyenne calculée par le site spécialisé RealClearPolitics.com.
Son élection représenterait un casse-tête pour le chef de la majorité sénatoriale, Mitch McConnell, qui craint qu'il ne lui mette régulièrement des bâtons dans les roues, comme le Texan Ted Cruz.
"Strange est perçu comme un supporteur loyal tandis que Moore est un électron libre", résume la professeur de science politique Carol Cassel, de l'Université de l'Alabama.
Pour le politologue Robert Boatright, qui estime que Roy Moore l'emportera, le vrai intérêt du scrutin de mardi prochain sera de révéler l'influence électorale effective de Donald Trump auprès de la base républicaine.
"La seule leçon à tirer sera que Trump n'a pas démontré qu'il était capable d'aider qui que ce soit", affirme l'expert.
Avec AFP