"Au deuxième trimestre, le PIB a décliné de 2,06% (sur un an)" après une baisse de 0,36% au premier trimestre, selon les chiffres du Bureau national des Statistiques (NBS) dévoilés mercredi matin.
Le ralentissement de la croissance touche de nombreux secteurs, indiquant que le géant économique de l'Afrique souffre de problèmes bien plus importants que la baisse du prix du baril du pétrole, en dépit de la forte dépendance de l'économie nigériane aux hydrocarbures.
Les investisseurs étrangers, méfiants après la décision du gouvernement de maintenir le naira à un taux artificiel, ne sont pas revenus investir après sa dévaluation en juin dernier. Le pays enregistre un taux "historiquement" bas d'importation de capitaux, rapporte le NBS.
Les 647,1 millions de dollars investis au Nigeria au second trimestre, représentent une "chute de 75,73%" par rapport à la même période en 2015.
"S'il est confirmé, ce chiffre provisoire serait le plus bas enregistré (...) et représenterait aussi la plus grosse chute de capitaux d'une année à l'autre", écrit l'agence des statistiques. "Il y a eu de grandes incertitudes concernant les politiques de taux de change, qui ont sûrement effrayé les investisseurs", selon leur rapport.
Le président Muhammadu Buhari a finalement décidé de laisser flotter le naira en juin, après l'avoir artificiellement maintenu à taux fixe pour maintenir des prix bas et éviter une trop grande inflation.
"Avenir vraiment sombre"
Mais l'administration Buhari a tardé à mettre en place cette politique monétaire que tous les experts encourageaient depuis des mois, ce qui n'a pas rassuré les investisseurs alors que l'inflation dépassait les 17% en juillet.
D'autre part, le secteur pétrolier, duquel le Nigeria tire l'essentiel de ses revenus depuis 50 ans, est toujours sous la menace des sabotages et des attaques des groupes armés dans le Delta du Niger.
"L'avenir est vraiment, vraiment sombre", estime John Ashbourne, économiste pour la société de recherche Capital Economics.
"Les investisseurs ont besoin de voir les directions que va prendre Buhari. Pour l'instant, ils sentent que les décisions qu'il a prises jusqu'à présent ne fonctionnent pas", explique M. Ashbourne, contacté par l'AFP.
"Le Nigeria est très dépendant des investissements étrangers pour améliorer ses infrastructures et remettre l'économie sur ses rails, il y a besoin de restaurer la confiance", poursuit-il.
La dévaluation du naira était essentielle pour tenter de renflouer les caisses de l'Etat, vidées par la chute du prix du baril: pour chaque dollar gagné grâce à ses exportations, le gouvernement a plus de nairas à dépenser.
"Bien que l'on ait pu constater quelques avantages à avoir libéralisé l'économie, ce n'est toujours pas la panacée", commente Razia Khan, économiste pour Standard Chartered Bank.
"La grande question aujourd'hui c'est +combien de temps cela prendra pour sortir de la récession?+", s'interroge-t-elle.
Le gouvernement nigérian, lui, se veut confiant. "La seconde moitié de l'année 2016 sera bien meilleure que la première", a rassuré Adeyemi Dipeolu, conseiller économique pour la présidence.
"Les dépenses d'investissement commencent à montrer des résultats (...) et le taux de croissance du Nigeria a de grandes chances de remonter", a-t-il asséné.
Mais le Nigeria, au risque de s'endetter pour mettre en oeuvre ses politiques ambitieuses d'infrastructures, aura un besoin massif de capitaux étrangers pour relancer un secteur de l'énergie en décrépitude.
Les prédictions internationales sont moins encourageantes que les autorités nigérianes.
Le PIB du Nigeria pourrait se contracter de 1,8% cette année, selon le Fonds monétaire international.
Mi-juillet, la société d'étude de marché BMI Research prévoyait un repli de la croissance nigériane à 4,3% sur les dix prochaines années, alors que le pays avait enregistré une moyenne de 6,8% sur la dernière décennie.
Avec AFP