Au Cameroun, les présidents du Sénat Marcel Niat Ndjifenji (86 ans) et de l’Assemblée nationale Cavaye Yeguié Djibril (81 ans) ont été reconduits dans leurs fonctions.
Pour de nombreux Camerounais, ces reconductions démontrent que la transition des générations peine à être implémentée par le président de la République, Paul Biya.
République des vieillards ?
"Aujourd’hui, le pays est géré par des vieillards devenus enfants et qui sont incapables de donner la moindre direction du vent”, soutient Aloys Parfait Mvoum, vice -président régional pour le Centre du Social Democratic Front (SDF), un parti de l’opposition. Joignant l'acte à la parole, il a lancé sur les réseaux sociaux une campagne baptisée “Non au travail forcé des vieillards”.
“Nous avons la certitude que leur positionnement ne dépend pas d’eux, mais des forces tapies autour d’eux qui les obligent à être là comme des marionnettes, et ces forces se servent agréablement dans le panier du Cameroun", confie à VOA Afrique Aloys Parfait Mvoum.
Les cas Cavaye et Niat
Le 18 mars dernier, sur une vidéo devenue virale, on aperçoit l’octogénaire président du Sénat Marcel Niat Ndjifenji se déplacer péniblement pour rejoindre le perchoir devant les sénateurs qui viennent de le réélire.
Ces images ont été abondamment commentées sur la toile par les Camerounais. Très affaibli par la maladie, le président réélu du Sénat a même été contraint de lire son discours assis avec une voix à peine audible.
A l’Assemblée nationale, Cavaye Yeguié Djibril a été maintenu à 81 ans au poste qu’il occupe depuis 1992. “Ma profonde gratitude, je l’adresse humblement à Son Excellence Monsieur Paul Biya, Président de la république et président de mon parti", a déclaré M. Cavaye, dans un discours solennel.
Les deux chambres du Parlement sont contrôlées par le Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC), le parti du président Biya. Ses députés et sénateurs reçoivent toujours les consignes de la hiérarchie du parti sur le choix des présidents de l’Assemblée nationale et du Sénat.
“On assiste à des connivences acceptées par tous pour les seuls intérêts qui sont la recherche des prébendes, des postes, des missions et du trafic d’influence”, déplore le vice-président régional du Centre du SDF.
La transition adviendra-t-elle un jour ?
Le statu quo au perchoir des deux chambres a résigné même certains leaders de l’opposition.
Le député Cabral Libii, 40 ans, président du Parti camerounais pour la réconciliation nationale dit avoir pris "acte de la reconduction et nous souhaitons que le travail du bureau se fera beaucoup plus dynamique".
De nombreux Camerounais ont espéré un début de transition des générations telle qu'évoquée par le Président Paul Biya lors de son discours à la jeunesse le 10 février dernier.
"C’est à se demander si le Président de la république se prépare à la transition générationnelle", s’interroge Steve Tametong. Ce dernier fait d’ailleurs observer que "la transition générationnelle est plus en vigueur dans la préfectorale".
Mais, nuance-t-il, "à des postes de responsabilités clés de pouvoir, le Président de la république continue encore à travailler avec ceux qui sont de sa génération, ce qui pose un véritable problème".
Une écrasante majorité de la population camerounaise est constituée de jeunes. Même le poste de ministre de la jeunesse a toujours été jusqu'ici confié à une personnalité de plus de 50 ans.