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Les gangs politiques sous le feu des projecteurs au Nigeria


Les services d'urgence, la police et les habitants se rassemblent sur les lieux d'un attentat-suicide près d'un marché, à Maiduguri, Nigeria, 11 décembre 2016.
Les services d'urgence, la police et les habitants se rassemblent sur les lieux d'un attentat-suicide près d'un marché, à Maiduguri, Nigeria, 11 décembre 2016.

L'utilisation de gangs politiques au Nigeria est à nouveau sous le feu des projecteurs après que les auteurs présumés de braquages meurtriers ont accusé le président du Sénat de les avoir recrutés.

Au total, 22 suspects ont été arrêtés pour leur participation présumée aux braquages de six banques dans la ville d'Offa, dans l'Etat de Kwara (centre), le 5 avril, qui ont fait 33 morts.

Dimanche, la police a invité le président du Sénat, Bukola Saraki, ancien gouverneur de l'Etat de Kwara, à se rendre dans ses locaux pour répondre aux accusations portées contre lui par plusieurs de ces suspects.

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Cinq d'entre eux, ont "admis et avoué" qu'ils étaient "des voyous politiques" ayant reçu "des armes, de l'argent et des véhicules opérationnels" de M. Saraki et de son successeur au poste de gouverneur, Abdulfatah Ahmed, selon un communiqué de la police.

Le gang aurait été au service de M. Saraki sous le nom de Youth Liberation Movement ("Mouvement de libération de la jeunesse") ou de "Good Boys".

M. Saraki a qualifié ces allégations de "sans fondement" et a affirmé avoir été piégé.

L'utilisation de jeunes hommes comme hommes de main politiques n'est pas nouvelle au Nigeria et le phénomène pourrait s'amplifier à l'approche des élections prévues en février.

"Même dans les années 1960, sous la Première République, nous avions l''Operation Wetie' dans l'ouest du Nigeria, où les hommes politiques utilisaient des voyous pour brûler des maisons et tuer leurs opposants", rappelle Don Okereke, un expert en matière de sécurité.

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Depuis, des milices ethniques sont apparues, comme le Oodua People's Congress dans le Sud-Ouest, les Bakassi Boys dans le Sud-Est et le Niger Delta Vigilante Service dans le Sud.

Parmi leurs homologues dans le Nord figurent Sara-Suka, Yan Daba et Kauraye, des gangs actifs dans les Etats de Gombe, Kano et Katsina.

Lutte pour le pouvoir

Pour M. Okereke, le recours aux gangs s'explique par une perte des valeurs de la société et les difficultés économiques ainsi que par la volonté désespérée des hommes politiques d'accéder au pouvoir et de s'y maintenir.

"Nos jeunes ont perdu les valeurs morales les conduisant à bien se comporter. C'est aussi une question de pauvreté et de chômage", a-t-il déclaré à l'AFP. "Ils sont devenus des instruments consentants aux mains de politiciens prêts à tout, qui exploitent leur médiocre condition pour réaliser leur ambition politique".

Le commentateur Chris Ngwodo approuve : "Le banditisme est profondément enraciné dans notre vie politique à cause des enjeux importants qu'implique la lutte pour le pouvoir".

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"Ces voyous causent des troubles, provoquent des tensions et déchaînent de la violence au nom de leurs patrons qui sont généralement les hommes importants, les hauts responsables gouvernementaux et hommes politiques", explique-t-il.

Au fil du temps, ils peuvent passer des menaces, de l'intimidation et du bourrage des urnes au crime - ou pire.

"C'est pourquoi il y a un lien direct entre le banditisme politique, la violence et des crimes organisés comme les braquages, les enlèvements, l'appartenance à un gang et les assassinats", explique M. Ngwodo.

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D'anciens membres du gang ECOMOG recrutés par l'ancien gouverneur de l'Etat de Borno, Ali Modu Sheriff, qui les a laissé tomber quand il a quitté son poste, auraient gagné les rangs de Boko Haram.

Le groupe islamiste, qui à ses débuts finançait ses activités par des braquages de banques et des extorsions de fonds, a tué au moins 20.000 personnes dans le nord-est du Nigeria depuis 2009.

Boko Haram a été accusé de manière répétée d'avoir des sponsors politiques, même si aucun lien n'a jamais été établi.

"Pratique malsaine"

La police de Lagos a récemment mis en garde les parents contre un recrutement de leurs enfants, vu les risques de tomber dans d'autres activités criminelles, y compris les enlèvements.

Le président Buhari espère être réélu pour un deuxième mandat de quatre ans à la présidentielle de février 2019, sur fond d'insécurité croissante du fait de tensions ethniques et religieuses.

Eradiquer la pratique des gangs politiques ne sera pas facile étant donné le système nigerian de clientélisme politique et l'attrait de l'argent et d'un statut pour les nombreux jeunes mécontents et sans emploi.

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"La tendance se poursuivra tant qu'il y aura des garçons d'accord pour être au service de politiciens qui ont les moyens de les récompenser de manière adéquate", estime Ngwodo. "A l'approche de l'élection de 2019, nous verrons se manifester davantage cette pratique malsaine".

Selon lui, un moyen de s'en sortir est de rendre les postes officiels moins attractifs, afin de réduire l'accès à des fonds secrets susceptibles d'être utilisés pour embaucher des voyous au service d'intérêts politiques égoïstes.

Avec AFP

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