Aujourd'hui, ceux qui ne sont pas d'accord avec M. Sissi n'ont rien d'autre à espérer qu'un départ du président en 2022.
Dans la course à la présidentielle, avant le scrutin des 26, 27 et 28 mars, les candidats potentiels ont été évincés un à un. Et M. Sissi n'a qu'un seul adversaire: Moussa Mostafa Moussa... l'un de ses soutiens.
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"Attention. Cette chose qui s'est passée il y a sept ou huit ans (la révolte de 2011) ne se reproduira pas en Egypte...", a martelé le président Sissi lors d'un discours en janvier, peu après que l'un de ses rivaux, le général Sami Anan, eut été arrêté pour avoir déclaré sa candidature.
M. Sissi, ancien chef de l'armée, a été élu pour un premier mandat en 2014, un an après avoir destitué son prédécesseur, l'islamiste Mohamed Morsi.
M. Morsi, premier président civil élu démocratiquement, s'était rapidement rendu impopulaire, au point de faire redescendre les Egyptiens dans la rue à l'été 2013 pour réclamer son départ.
Depuis, le pays a dû faire face à une insurrection jihadiste avec des centaines de victimes du côté des forces de sécurité. Et les Egyptiens ont dû affronter l'une de pires crises économiques de leur histoire.
"La priorité est de remédier à la situation, et pas nécessairement en utilisant les normes traditionnelles de la démocratie", explique Mostafa El-Feki, personnalité favorable au gouvernement et chef de la Bibliotheca Alexandrina, bibliothèque et centre culturel dans la ville d'Alexandrie (nord).
"C'est sa priorité, et c'est l'intérêt supérieur du peuple égyptien", affirme-t-il.
Mais en l'absence de sondages fiables, il reste difficile de connaître précisément le sentiment des Egyptiens face à cette politique. Et les médias nationaux évitent généralement les critiques contre l'Etat.
Quant aux services de sécurité, ils tolèrent mal les différences d'opinions telles que celles qui ont préfiguré la révolte de 2011.
Dans ces conditions, l'opposition composée de petits partis, en est réduite à tenter "d'exister", estime Khaled Dawoud, une figure d'opposition.
Mohamed Anouar Sadate, le neveu de l'ex-président assassiné, qui a retiré sa candidature en janvier évoquant des restrictions, dit espérer des réformes démocratiques durant le second mandat de M. Sissi. Selon la Constitution égyptienne, un président ne peut briguer que deux mandats.
"Cela serait une occasion en or pour le président de commencer à travailler sur le dossier de la politique et des réformes, et de tenter de construire de véritables institutions", estime M. Sadate.
Initialement, le président avait deux rivaux de poids: l'ancien chef d'état-major Sami Anan -ensuite arrêté- et l'ex-Premier ministre Ahmed Chafiq.
Ce dernier a été interpellé à son retour d'exil aux Emirats arabes unis, après s'être déclaré candidat. Conduit dans un hôtel, il y est resté jusqu'à ce qu'il retire sa candidature.
De son côté, après avoir fait campagne pour le président, M. Mostafa Moussa s'est déclaré candidat à la dernière minute pour éviter à M. Sissi la situation embarrassante d'avoir à se présenter seul.
Selon M. Sadate, le président l'aurait de toute façon emporté, même avec MM. Chafiq et Anan comme concurrents.
"Peut-être que l'inquiétude était que s'il y avait eu de vrais candidats (...) il y aurait eu une discussion, et je pense qu'ils (les gens au pouvoir) n'en voulaient pas", estime-t-il.
"C'est une approche de tolérance zéro", juge Michael Wahid Hanna, du cercle de réflexion Century Foundation. "Le régime de Sissi ne va pas laisser l'espace qui permettrait à des forces politiques de se développer", ajoute-t-il.
M. Sissi et ses partisans décrivent souvent l'Egypte comme la victime d'un complot étranger dont les agents peuvent être aussi bien des jihadistes que des représentants de médias étrangers.
A la suite de la destitution de M. Morsi, suivie d'une féroce répression contre les Frères musulmans avec des centaines de morts et d'arrestations, les Etats-Unis avaient décidé de sanctionner l'Egypte en suspendant l'aide militaire.
Mais une telle politique n'a eu que peu d'effet sur le régime de M. Sissi, selon une ancienne responsable de l'administration de Barack Obama qui a souhaité garder l'anonymat.
Avec AFP