Dans le village de Gogjali récemment repris à l'EI à la périphérie est de Mossoul, des camions transportant de l'artillerie et des combattants irakiens pour renforcer la ligne de front croisaient des civils fuyant dans le sens inverse.
"Dieu merci nous avons enfin réussi à échapper à ces cochons de Daech (EI)", s'écrie un homme se présentant comme Mohammed.
Il était perché sur un camion bondé de familles se dirigeant vers une zone sous contrôle kurde, où des organisations humanitaires construisent des camps pour les déplacés.
Les forces irakiennes dirigées par l'unité d'élite du contre-terrorisme (CTS) ont nettoyé les villages environnant et sont désormais positionnées à la périphérie de cette ville du nord de l'Irak.
"Ne vous repliez pas", lance une voix présentée comme étant celle de Baghdadi dans un message audio diffusé jeudi par Al-Furqan, un média affilié à l'EI. "Tenir ses positions dans l'honneur est mille fois plus aisé que de se replier dans la honte".
Baghdadi lance cet appel à la discipline à "tous les habitants de Ninive", la province où se trouve Mossoul, la plus grande ville jamais conquise par l'EI.
Il leur promet "la victoire" alors que les jihadistes sont en grande difficulté dans ce bastion vers lequel convergent depuis le 17 octobre et avec le soutien des frappes de la coalition internationale plusieurs dizaines de milliers de soldats et de policiers des forces de sécurité fédérales irakiennes ainsi que des combattants de la région autonome du Kurdistan.
Moral 'bas' des jihadistes
La précédente déclaration audio de Baghdadi remonte au mois de décembre 2015.
La teneur du nouveau message "suggère que les chefs du groupe sont de plus en plus préoccupés par les défections et cherchent le moyen d'empêcher (les jihadistes) de fuir le champ de bataille", estime Ludovico Carlino, un expert de IHS à Londres. Le moral est, selon lui, "bas" chez les "conscrits" de l'EI à Mossoul qui "sont forcés à se battre par une minorité de combattants idéologiquement plus déterminés".
Pour le Pentagone, le chef de l'EI est en train de perdre le contrôle de ses troupes.
"C'est probablement le signe clair que ses capacités à diriger ses combattants et à communiquer avec eux ont été sévèrement diminuées", a estimé le colonel américain John Dorrian, porte-parole de la coalition internationale antijihadistes.
Sur le terrain, les 8.000 hommes de la 9e division progressaient sans rencontrer de forte résistance dans le village d'Ali Rash, à 8 km au sud-est de Mossoul.
"Devant la puissance de nos chars et de notre artillerie (...) l'ennemi a non seulement abandonné du terrain, mais il a aussi laissé derrière lui de l'équipement, des véhicules, des munitions", a indiqué leur commandant, le général Qassim Al-Maliki.
Il s'attend cependant à ce que les combats s'intensifient à Mossoul même, où entre 3.000 et 5.000 jihadistes seraient déployés.
'Pieds nus'
A Gogjali où les combats étaient entendus, une journaliste de l'AFP a vu un nombre croissant de civils se diriger vers les zones reconquises par l'armée.
"Des enfants sont arrivés pieds nus, sans assez de nourriture et d'eau", a indiqué Alvhild Stromme, de l'ONG Norwegian Refugee Council (NRC), l'une des plus actives en Irak. "Les gens qui fuient (...) racontent combien leur fuite a été dangereuse".
L'ONG Save The Children évalue à 600.000 le nombre d'enfants présents parmi les plus de 1,2 million de personnes à Mossoul.
Soulagé, Ahmed Khalil, 52 ans, raconte avoir été, avec sa femme et ses trois enfants, "assiégés" dans sa maison "pendant trois jours".
Raed Ali, 40 ans, estime lui revenir "de la mort vers le monde des vivants" car "ça bombardait de partout".
Plus de 21.000 personnes ont fui vers les zones contrôlées par le gouvernement depuis le 17 octobre, tandis que des milliers d'autres pourraient avoir été prises par l'EI pour servir de boucliers humains, selon l'ONU.
Amnesty International a par ailleurs affirmé que des miliciens irakiens avaient mené des "attaques punitives" dans des villages au sud-est de Mossoul, en "représailles des crimes commis par l'EI".
Avec AFP