Liens d'accessibilité

Dernières nouvelles

Les élections sénatoriales de 2025, un tournant pour le Togo, selon Samuel Gnanhoui


Des électeurs font la queue dans un centre de vote installé dans une école primaire publique de Lomé, lors des élections présidentielles, Togo, le 22 février 2020.
Des électeurs font la queue dans un centre de vote installé dans une école primaire publique de Lomé, lors des élections présidentielles, Togo, le 22 février 2020.

Les élections sénatoriales prévues pour ce samedi 15 février 2025 au Togo marquent un tournant dans la politique du pays, avec l'instauration d'un Sénat dans le cadre du nouveau régime parlementaire instauré par la révision constitutionnelle d'avril 2024, selon le journaliste Samuel Gnanhoui.

Alors que le pouvoir en place soutient que ces élections sont un pas vers une plus grande stabilité politique, l'opposition, elle, dénonce un processus antidémocratique et a choisi de boycotter largement ce scrutin. À l’approche de ce moment crucial pour l’avenir politique du pays, nous avons interrogé Samuel Naoui, journaliste et analyste politique, pour en savoir plus sur les enjeux et les implications de cette réforme.

Les enjeux des élections sénatoriales

Pour comprendre l'importance de ce scrutin, Samuel Gnanhoui rappelle que ces élections marquent l’aboutissement d’un long processus de réformes constitutionnelles.

Il rappelle que le Togo, depuis la révision de sa Constitution en avril 2024, a adopté un nouveau cadre parlementaire, avec un Sénat désormais prévu pour jouer un rôle clé aux côtés de l'Assemblée nationale. Ce Sénat de 61 membres, qui sera installé après le scrutin de ce samedi, n’a jamais existé sous les précédentes républiques, bien qu’il ait été prévu dans la Constitution de la 4e République.

Les enjeux des élections sénatoriales au Togo : Une interview avec Samuel Gnanhoui
Attendez s'il vous plaît

No media source currently available

0:00 0:06:41 0:00

"Les enjeux sont considérables, car la mise en place du Sénat complète le processus d'installation des institutions de la 5e République. Ce Sénat va jouer un rôle majeur dans le processus législatif et dans l’orientation politique du pays. Avec la modification de la Constitution, le Togo a désormais un régime parlementaire, ce qui fait du Sénat une institution clé dans la Nouvelle République", explique Samuel Gnanhoui.

Le rôle du Sénat dans le cadre parlementaire

Parallèlement à sa fonction législative, le Sénat, avec l'Assemblée nationale, aura la responsabilité de désigner le président du Conseil, une fonction actuellement exercée par Faure Gnassingbé, président de la République. Cette désignation sera donc l’un des principaux rôles de cette nouvelle institution.

Le président du Conseil, élu par le Parlement, exercera des prérogatives qui étaient jusque-là du ressort exclusif du président de la République. Selon Ghanhoui, "le Sénat aura un rôle significatif dans cette élection indirecte du président, ce qui est un changement majeur dans le processus de désignation du pouvoir exécutif."

Le boycott de l'opposition : Une contestation des réformes

Malgré l’importance de ces élections, plusieurs partis politiques de l’opposition, dont l'Alliance nationale pour le changement (ANC), les Forces démocratiques pour la République (FDR) et la Dynamique pour la majorité du peuple (DMP), ont annoncé qu'ils boycotteraient ce scrutin.

Cette décision s'inscrit dans un contexte de mécontentement face à la révision constitutionnelle de 2024, que ces partis jugent illégitime.

Pour eux, ces réformes visent à maintenir Faure Gnassingbé au pouvoir et à fragiliser les institutions démocratiques du pays.

"Le boycott de l’opposition est compréhensible", explique Samuel Gnahoui. Après leur défaite électorale lors des législatives de 2023, une partie de l'opposition a décidé de ne pas reconnaître les réformes en cours, qui sont vues comme un moyen pour le président de consolider son pouvoir.

En outre, le mode de scrutin pour élire les sénateurs n’est pas basé sur un suffrage universel direct, mais sur un système indirect où seuls les conseillers municipaux et régionaux peuvent voter. Cela réduit la capacité de l'opposition à faire élire ses candidats."

Le rejet des élections sénatoriales par l’opposition est également lié à la question de la légitimité du Sénat. "L’opposition considère que ce processus ne garantit pas une représentation véritablement démocratique du peuple et que, par ce biais, le pouvoir s’octroie un contrôle quasi-total des institutions", précise Gnanhoui.

L’avenir du Sénat dans le nouveau cadre parlementaire

L’avenir du Sénat, et plus généralement du cadre parlementaire, semble être un point de discorde important. Si le Sénat ne semble pas détenir de pouvoir exécutif direct, il reste une institution clé dans la désignation des autorités politiques.

Samuel Gnanhoui envisage cependant des évolutions possibles."Il est important que le pouvoir en place envisage un dialogue avec l’opposition pour résoudre les tensions politiques. Bien que l’opposition ait choisi de boycotter ces élections, elle doit pouvoir être intégrée dans le processus de réconciliation nationale. Pour l’avenir sociopolitique du Togo, il sera essentiel de garantir une véritable concertation pour préserver la paix sociale et renforcer la stabilité.", assure-t-il.

Un processus en marche malgré les contestations

Malgré le boycott de l’opposition, le processus législatif suit son cours. Le pouvoir en place dispose d’une large majorité au Parlement, et l’élection des sénateurs ne semble pas susceptible de remettre en cause la composition de ces institutions.

Cependant, comme le souligne Samuel Gnanhoui, l’histoire du Togo a montré que les élections, même en l’absence d’une large participation de l’opposition, continuent de façonner le paysage politique du pays. "Il est crucial que le gouvernement entende les préoccupations de l’opposition et engage un véritable dialogue pour l’avenir du pays. Si ce dialogue est absent, il risque de perpétuer des tensions sociales qui pourraient nuire à la cohésion nationale", conclut-il.

Les élections sénatoriales du 15 février 2025 marqueront un moment clé dans l’évolution politique du Togo. Le Sénat, bien que critiqué par une partie de l’opposition, représente une réforme importante dans la mise en place du nouveau régime parlementaire du pays.

Il faudra cependant suivre de près la manière dont les tensions entre le pouvoir et l’opposition évolueront, et si un dialogue politique pourra être engagé pour apaiser les divisions et garantir une représentativité réelle des différentes forces du pays.

Forum

XS
SM
MD
LG