Attendue avec impatience depuis plusieurs jours, la décision de la plus haute instance judiciaire du pays est tombée dans la nuit et a donné partiellement raison aux adversaires du régime.
Ses magistrats ont ainsi jugé "non conformes" à la Constitution plusieurs dispositions des textes récemment votés par le Parlement, sur la révision des listes électorales, la durée des campagnes, l'utilisation des bulletins uniques ou les conditions nécessaires à la candidature à la présidence.
Depuis le 21 avril, des centaines de partisans de l'opposition occupent chaque jour la place du 13-Mai, au coeur de la capitale Antananarivo, pour exiger la démission du chef de l'Etat.
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A sept mois des scrutins présidentiel et législatifs annoncés pour la toute fin de l'année, ils lui reprochent d'avoir changé les règles du jeu électoral à son seul bénéfice.
Dans son arrêt, la Haute cour a corrigé ces textes en "extirpant", selon ses termes, plusieurs dispositions organisant le scrutin présidentiel, dont le raccourcissement de la durée de la campagne électorale du second tour de 15 jours à 7 jours ou la possibilité de recourir à des bulletins de vote uniques.
"C'est un première victoire pour le changement", s'est réjouie la députée de l'opposition Hanitriniaina Razafimanantsoa devant ses troupes réunies place du 13-Mai.
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Pas question pour autant de suspendre la fronde, s'est-elle empressée d'ajouter. "La route continue pour le changement, avec la démission du gouvernement", a lancée, micro à la main, l'élue sous les hourras de la foule.
Les manifestants ont ensuite défilé dans les rues du centre-ville pour appeler les fonctionnaires à la grève.
'Vers les élections'
De son côté, le chef du parti présidentiel HVM a entrevu dans l'arrêt de la Haute cour la fin prochaine du mouvement. "Aucun réexamen d'article n'est exigé, il y a juste des réserves", a déclaré à l'AFP, soulagé, Rivo Rakotovao. "On va pouvoir maintenant avancer vers les élections".
La crise politique actuelle a débuté le 21 avril. Ce jour-là, une première manifestation de l'opposition, interdite par les autorités, avait dégénéré en graves affrontements avec les forces de l'ordre.
Ce face-à-face a fait au moins 2 morts et 16 blessés dans les rangs des protestataires, accusant les forces de l'ordre d'avoir ouvert le feu à balles réelles, qui évoquent elles un bilan de 5 morts.
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Le mouvement a depuis viré à la fronde contre le président Rajaonarimampianina et son bilan dans un pays parmi les plus pauvres de la planète.
L'opposition et le parti au pouvoir se sont rencontrés la semaine dernière sous l'égide de l'Union africaine (UA) pour tenter de sortir de la crise mais leurs discussions ont tourné court.
Elu en 2013, Hery Rajaonarimampianina n'a pas encore annoncé s'il allait briguer un second mandat cette année.
En revanche, les deux principaux chefs de l'opposition, Marc Ravalomanana, président de 2002 à 2009, et Andry Rajoelina, au pouvoir de 2009 à 2014, ont déjà laissé entendre qu'ils étaient prêts à se lancer dans la bataille.
Ces deux anciens ennemis font aujourd'hui cause commune contre le régime en place. Tous les deux avaient été interdits de candidature en 2013.
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M. Ravalomanana a été renversé en 2009 après une mutinerie de l'armée qui avait permis à M. Rajoelina, alors maire de la capitale, de devenir président non élu d'une transition qui a duré jusqu'en 2014 et l'arrivée au pouvoir de M. Rajaonarimampianina.
Mercredi, l'armée et la police malgaches ont mis en demeure, par la voix du ministre de la Défense le général Béni Xavier Rasolofonirina, le gouvernement et l'opposition de trouver rapidement une issue à la crise.
Avec AFP