L'affluence dans la capitale a semblé l'une des plus faibles depuis la naissance, le 22 février, du "Hirak", "mouvement" populaire, inédit et massif de contestation en Algérie.
Les manifestants ont affiché leur détermination: "Le +Hirak+ va continuer jusqu'au départ de ce +système+ (...) On ne s'arrêtera pas", a assuré Asma, étudiante de 23 ans. "Nous on est là, on continue le combat", poursuit Hocine, fonctionnaire de 50 ans.
Le cortège a brandi des portraits de Ramdane Abane, assassiné il y a 62 ans jour pour jour par certains de ses compagnons de lutte contre le colonisateur français au sein du Front de libération nationale (FLN).
Dirigeant historique du mouvement, Ramdane Abane était l'un des architectes de sa plateforme politique consacrant notamment la "primauté du politique sur le militaire".
Depuis que le "Hirak" a obtenu, en avril, la démission d'Abdelaziz Bouteflika, après 20 ans de présidence, il exige le démantèlement total du "système" qui dirige l'Algérie depuis son indépendance en 1962 et se caractérise par un fonctionnement opaque au cœur duquel le haut commandement de l'armée occupe une place prépondérante.
Certains manifestants expliquent la baisse d'affluence par les vacances scolaires, d'autres refusent d'admettre que le cortège est moins dense, comme Fatma Zohra, retraitée, selon qui "la mobilisation reste très forte".
Ce 45e vendredi consécutif de manifestation, d'une contestation entrée dans son 11e mois, était le deuxième depuis l'entrée en fonctions, le 19 décembre, du nouveau président Abdelmadjid Tebboune.
Ex-fidèle de M. Bouteflika, il a été remporté sur fond d'abstention historique (60%) un scrutin organisé par le pouvoir pour élire un successeur au président déchu. Les semaines précédant le vote, des cortèges d'ampleur exceptionnelle avaient dénoncé une volonté du régime de se régénérer.
"Tebboune, dégage!", ont scandé vendredi les manifestants, le nouveau président remplaçant dans les slogans le chef d'état-major de l'armée, le général Ahmed Gaïd Salah, décédé le 23 décembre d'une crise cardiaque à 79 ans.
Ouvertement maître du pays ces huit derniers mois et considéré par la contestation comme le gardien du "système", rejetant ses revendications et réprimant ses militants, il était massivement conspué dans les cortèges.
La mobilisation de vendredi a contrasté avec la foule impressionnante ayant rendu hommage deux jours avant au général Gaïd Salah.
Avant la manifestation vendredi, les Algérois avaient paru partagés sur la poursuite des manifestations: certains déterminés à continuer, d'autres hésitants, ou partisans du dialogue ou de nouveaux modes d'action.
Le cortège algérois s'est dispersé sans incident. A Oran et Constantine, 2e et 3e villes du pays, la mobilisation a également faibli, tandis qu'à Annaba, 4e ville du pays, où vit la famille du général Gaïd Salah, la police a empêché la manifestation, selon des journalistes locaux.
Dans ces trois villes, des partisans du pouvoir ont provoqué les manifestants qui n'ont pas répondu, selon ces journalistes. Des manifestations se sont également déroulées dans d'autres villes du pays, selon les réseaux sociaux.