"La jurisprudence est assez claire sur les expulsions collectives, qui sont interdites", a rappelé jeudi le président de la CEDH Guido Raimondi.
Interrogé lors d'un point de presse à Strasbourg sur le projet suédois d'expulsions massives de demandeurs d'asiles déboutés il a précisé qu'il fallait vérifier si chaque cas allait être "considéré de façon individualisée".
De fait les expulsions collectives sont interdites à l'article 4 du Protocole numéro 4 de la convention européenne des droits de l'homme.
Par expulsion collective la CEDH entend "toute mesure contraignant des étrangers, en tant que groupe" à quitter un pays. "Sauf dans les cas où une telle mesure est prise à l'issue et sur la base d'un examen raisonnable et objectif de la situation particulière de chacun des étrangers qui forment le groupe", précise la Cour sur son site internet.
C'est ainsi que l'Italie avait été condamnée en 2012 pour avoir arrêté en mer un groupe de migrants somaliens et érythréens et les avoir reconduits en Libye, sans examen de leurs situations individuelles (Hirsi Jamaa et autres c. Italie).
Dix ans plus tôt la Belgique avait été condamnée pour avoir expulsé un groupe de ressortissants slovaques d'origine tzigane qui disaient être victimes de mauvais traitements dans leur pays d'origine : ils avaient été arrêtés avant même qu'ils aient pu remplir leurs demandes d'asile en Belgique.
Si l'expulsion collective est possible après un examen individualisé de chaque demande d'asile, l'Etat concerné doit également faire attention à la destination vers laquelle il décide l'expulsion.
Dans l'arrêt Soering c. Royaume-Uni, en 1989, la CEDH a dit pour la première fois que la responsabilité d'un État pouvait être engagée "s'il décide d'éloigner une personne susceptible de subir de mauvais traitements dans le pays de destination".
Dans l'affaire Hirsi Jamaa et autres contre Italie, la Cour avait également condamné les autorités italiennes pour avoir, "en pleine connaissance de cause", exposé les migrants somaliens et érythréens "au risque de subir de mauvais traitements en Lybie".
A de nombreuses reprises, elle a eu l'occasion de demander à certains pays de ne pas renvoyer chez eux des opposants politiques, des membres d'organisations illégales, des personnes accusées de terrorisme dans un pays donné, mais aussi des membres de minorités ethniques ou religieuses stigmatisées ou persécutées.
Elle a également, entre autres, jugé que le risque d'être lapidée pour une Iranienne accusée d'adultère, ou celui encouru par une Afghane de subir des violences conjugales en cas de retour au pays étaient des motifs valables pour empêcher un renvoi vers le pays d'origine.
Avec AFP