Après l'avoir évincé de sa direction, son parti, la Zanu-PF, lui avait laissé jusqu'à lundi 12h00 (10h00 GMT) pour partir, faute de quoi il lancerait contre lui une procédure de destitution.
En l'absence de réponse du président, campé sur son refus, les députés et sénateurs de la Zanu-PF devaient se retrouver à 16h00 (14h00 GMT) pour initier cette procédure qui pourrait prendre plusieurs jours.
Lors d'un discours télévisé dimanche soir, le plus vieux dirigeant en exercice de la planète, âgé de 93 ans, s'est permis un nouveau bras d'honneur au pays en refusant, contre toute attente, de quitter ses fonctions.
Entouré des militaires qui contrôlent le pays, M. Mugabe a même lancé qu'il présiderait le mois prochain le congrès de son parti, malgré son expulsion de la direction de la Zanu-PF.
Insistant sur le fait qu'il restait le "commandant en chef" du pays, il a reconnu "les problèmes" soulevés par les militaires mais prêché, sibyllin, pour leur résolution "dans un esprit de camaraderie zimbabwéenne".
Sa déclaration a fait l'effet d'un coup de tonnerre dans le pays, qui espérait que le vieux dirigeant, lâché un à un par tous ses soutiens, renonce enfin.
Très influents, les anciens combattants de la guerre d'indépendance lui ont à nouveau ordonné lundi de partir.
'Dans la rue'
"Epargne d'autres troubles au pays. Sinon, nous allons ramener le peuple du Zimbabwe dans les rues", lui a lancé lundi matin devant la presse l'influent chef des vétérans, Chris Mutsvangwa.
Il a confirmé l'organisation mercredi d'une nouvelle manifestation anti-Mugabe dans la capitale.
Sous l'oeil bienveillant de l'armée, plusieurs dizaines de milliers de personnes avaient déjà envahi samedi les rues de la capitale Harare et de la deuxième ville du pays, Bulawayo (sud-ouest), aux cris de "Bye bye Robert" ou "Adieu grand-père".
Dès lundi matin, des centaines d'étudiants ont manifesté sur le campus de l'université d'Harare pour exiger le départ du chef de l'Etat, ont constaté des journalistes de l'AFP.
"Nous sommes en colère et déçus par le discours de Mugabe", a déclaré un de leurs meneurs, Shepherd Raradza.
Le chef historique de l'opposition Morgan Tsvangirai a également exprimé sa frustration après un discours du chef de l'Etat selon lui "totalement contraire aux aspirations du peuple".
"La soi-disant négociation avec l'armée n'a pas abouti à la sortie digne que la nation espérait", a-t-il regretté.
La rue zimbabwéenne a elle aussi été interloquée par le geste de défiance du "camarade Bob", dont elle désire ouvertement le départ, sur fond de désastre économique et financier.
Le Zimbabwe est plongé depuis le début des années 2000 dans une crise catastrophique.
'Risque de violences'
"Nous sommes déçus par Mugabe hier soir. On dirait qu'il vit dans un autre monde", a confié lundi à l'AFP Charles Muramba, un chauffeur de taxi de 46 ans. "Mais le mouvement est irréversible, il va partir", a-t-il assuré.
"Plus cette situation dure, plus le risque de violences s'accroît", s'est inquiété auprès de l'AFP Chris Vandome, du centre de réflexion britannique Chatham House.
Les militaires ont pris le contrôle du pays dans la nuit de mardi à mercredi pour protester contre la décision de Robert Mugabe de limoger le vice-président Emmerson Mnangagwa.
L'éviction de celui qu'on surnomme le "crocodile" pour son caractère impitoyable a fait de l'incontrôlable Première dame Grace Mugabe la grande favorite de la course à la succession de son mari, un scénario inacceptable pour l'état-major.
Depuis le coup de force des militaires, Robert Mugabe a perdu un à un tous les soutiens qui tenaient son régime autoritaire à bout de bras depuis l'indépendance du Zimbabwe en 1980.
Lors de sa réunion d'urgence dimanche, la Zanu-PF a remplacé Robert Mugabe à sa tête par l'ancien vice-président Mnangagwa, bombardé dans la foulée candidat à la présidentielle de 2018.
Depuis son coup de force, l'armée tente de négocier à l'amiable le départ du président Mugabe, afin de lui préserver son statut de héros de la guerre d'indépendance.
Inquiets de la situation, les dirigeants des pays voisins du Zimbabwe, dont les présidents sud-africain Jacob Zuma et angolais Joao Lourenço, doivent se réunir mardi à Luanda pour faire le point sur la crise.
Avec AFP