L'opposition au Kenya va saisir la Cour Suprême pour contester la réélection du président Uhuru Kenyatta qu'elle estime entachée de fraudes, a annoncé mercredi à la presse son leader Raila Odinga, après avoir dans un premier temps écarté cette option.
"Nous avons décidé de saisir la Cour et de montrer au monde la fabrication d'un pouvoir généré par ordinateur", a déclaré M. Odinga, réitérant ses accusations de fraude électronique du scrutin du 8 août.
M. Odinga, 72 ans, a également appelé à diverses formes de manifestations pacifiques, rappelant que la Constitution de 2010, dont il fut l'un des grands artisans, protégeait le droit de manifester, de faire grève et de recourir à la désobéissance civile.
"Nous prêcherons la paix (...) nous défendrons nos droits de se rassembler et de manifester. Nous organiserons des veillées, des minutes de silence, nous battrons le tambour et ferons tout ce qui est possible pour attirer pacifiquement l'attention sur ces injustices électorales flagrantes", a-t-il déclaré.
Au moins 17 personnes sont mortes dans les violences qui ont éclaté dès l'annonce vendredi de la victoire de M. Kenyatta, la police ayant réprimé implacablement les manifestations de colère des partisans de M. Odinga dans plusieurs de ses bastions, notamment les principaux bidonvilles de Nairobi et Kisumu (ouest).
"Les Kényans n'ont pas besoin de recourir à la violence pour obtenir justice", a assuré M. Odinga.
"Ce pays est à présent divisé entre ceux qui sont prêts à vivre dans une autocratie et les forces de liberté et pro-démocratiques", a-t-il estimé.
L'opposition affirme que le score de M. Kenyatta est le fruit d'une manipulation du système électronique de transmission et de comptage des voix utilisé par la Commission électorale, des accusations que M. Odinga a réitérées mercredi et que son camp devra prouver devant la Cour suprême.
En 2013, M. Odinga avait déjà saisi la Cour Suprême pour contester l'élection de M. Kenyatta dès le premier tour du scrutin, mais la Cour avait finalement validé le résultat.
Fort de ce précédent, la coalition d'opposition Nasa avait d'abord exclu de porter son contentieux en justice, malgré d'importantes pressions internationales en ce sens.
Mais, a expliqué M. Odinga, les récentes menaces de fermeture par le gouvernement de deux organisations susceptibles d'aller en justice ont contraint l'opposition à réviser sa position et à déposer elle-même le recours.
"Notre décision d'aller en justice constitue une deuxième chance pour la Cour suprême. La cour peut saisir cette chance pour se racheter ou, comme en 2013 elle peut aggraver les problèmes auxquels la Nation est confrontée", a-t-il expliqué.
Une fois saisie, d'ici l'expiration du délai légal vendredi, la Cour suprême disposera de 14 jours pour rendre son arrêt.
"Personne ne doit penser, et surtout pas ceux qui sont derrière le vol frauduleux de cette élection, que les Kényans sont des moutons disposés à accompagner le massacre de la démocratie", a-t-il averti.
Avec AFP