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Suspension du procès en appel de Hissène Habré


Des personnes marchent vers le palais de Justice à Dakar le 21 septembre 2015 où l'ancien dictateur Hissene Habré est jugé.
Des personnes marchent vers le palais de Justice à Dakar le 21 septembre 2015 où l'ancien dictateur Hissene Habré est jugé.

Le procès en appel du président tchadien déchu s'est ouvert en son absence à Dakar, sept mois après sa condamnation à perpétuité par un tribunal spécial africain, un jugement censé servir d'exemple pour le continent.

Hissène Habré, 74 ans, a été condamné le 30 mai pour crimes de guerre, crimes contre l'humanité, tortures et viols par les Chambres africaines extraordinaires (CAE), créées en vertu d'un accord entre l'Union africaine (UA) et le Sénégal, où il s'est réfugié après avoir été renversé en décembre 1990 par l'actuel président tchadien Idriss Déby Itno.

Il a ensuite été condamné en juillet à payer jusqu'à 20 millions de francs CFA (plus de 30.000 euros) par victime.

"La défense demande une dispense de comparution de l'accusé", a déclaré le président de la Chambre d'assises d'appel, le magistrat malien Wafi Ougadèye, au début de l'audience.

"Nous nous passons de sa présence", a ensuite annoncé le président, qui a expliqué lui avoir précédemment adressé une sommation à comparaître lundi.

L'accusé avait répondu que ne reconnaissant pas la Cour, "il ne peut recevoir un quelconque document venant d'elle", a-t-il indiqué.

L'ex-président tchadien (1982-1990) avait été amené de force à la barre en première instance.

Une demande présentée par la défense, de "décharge" de l'un des magistrats sénégalais, Bara Gueye, qui avait jugé une affaire connexe de poursuites en diffamation de Hissène Habré contre des journalistes sénégalais, a été rejetée.

La parole a été ensuite donnée à la défense, qui réclame l'annulation du verdict parce qu'"aucune preuve de la culpabilité du président Habré n'a été apportée", a déclaré Me Mbaye Sène, un avocat commis d'office pour M. Habré. L'audience a ensuite été suspendue jusqu'à mardi matin.

Face à son refus, tout au long du procès en première instance qui s'était ouvert le 20 juillet 2015, de s'exprimer ou d'être représenté, la Cour avait désigné trois avocats commis d'office pour assurer sa défense.

Ce sont ces trois avocats qui ont fait appel, et non les conseils désignés par l'accusé qui, selon ses instructions, ont boycotté les débats.

Les avocats qu'il a choisis continueront pour leur part à boycotter le procès, a affirmé à l'AFP l'un d'entre eux, Ibrahima Diawara.

- 'Insolvabilité organisée' -

Dans un arrêt rendu le 29 décembre, la Chambre d'assises d'appel a rejeté la demande des avocats commis d'office pour la défense, portant notamment sur l'audition de témoins.

La défense avait demandé l'audition de huit personnes, dont Idriss Déby Itno et Khadija Hassan Zidane, qui avait affirmé pendant le procès avoir été violée par Hissène Habré lui-même, un témoignage qui avait convaincu la cour.

La Chambre d'appel devra également examiner un appel des parties civiles portant sur les conditions d'attribution des réparations.

"Je n'ai aucun doute que le jugement sera confirmé. On ne peut pas violer impunément les lois internationales", a confié à l'AFP Souleymane Guengueng, président d'une association de victimes, détenu pendant plus de deux ans par la Direction de la Documentation et de la Sécurité (DDS, police politique du régime Habré).

Les débats devraient durer plusieurs jours, la décision finale étant attendue d'ici le 30 avril, date d'expiration du mandat du tribunal.

Le verdict sera définitif. En cas de condamnation, Hissène Habré purgera sa peine au Sénégal ou dans un autre pays de l'UA.

Les organisations de défense des droits de l'Homme ont souligné le caractère "historique" du procès en première instance, le premier dans lequel un ancien chef d'Etat a été jugé par les tribunaux d'un autre pour violation des droits de l'Homme.

De plus, "un ancien dictateur n'avait encore jamais été personnellement reconnu coupable de viol par une cour internationale", a souligné le juriste américain Reed Brody, qui travaille avec les victimes du régime Habré depuis 1999.

Amnesty International a demandé, comme M. Brody, qu'en cas de confirmation de la décision sur les réparations, les CAE, l'UA, le Tchad et la communauté internationale garantissent que "des ressources suffisantes soient mobilisées et allouées à un Fonds de dépôt".

"Le fonds n'est pas encore disponible", a reconnu lundi le porte-parole des CAE, Marcel Mendy, affirmant que "l'accusé lui-même a organisé son insolvabilité".

Une commission d'enquête tchadienne estime le bilan de la répression sous Hissène Habré à quelque 40.000 morts.

Avec AFP

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