La plupart des victimes sont des policiers, et selon un journaliste de l'AFP sur place, des lambeaux d'uniformes, des casquettes et des chaussures étaient disséminés sur les lieux de l'attentat à Quetta, grande ville du sud-ouest du Pakistan. Des enquêteurs rassemblaient des indices et des restes humains dans des sacs plastiques.
Les policiers étaient en train de se réunir devant le centre afin d'accompagner les vaccinateurs à l'occasion de la troisième journée d'une campagne de vaccination contre la poliomyélite dans le Baloutchistan, province instable dont Quetta est la capitale.
Selon un officier de la police locale, "il y a 15 morts, dont 12 policiers", un bilan confirmé par un médecin de l'hôpital Sandeman à Quetta.
"Je peux confirmer qu'il s'agit d'un attentat suicide", a indiqué le ministre provincial des affaires intérieures du Baloutchistan, Sarfaraz Bugti, évoquant en outre 15 blessés, dont 7 dans un état grave.
L'attentat a été revendiqué par les talibans pakistanais, qui mènent une insurrection contre le gouvernement depuis 2007. "Nous sommes responsables de l'attaque contre les forces de sécurité à Quetta", écrivent-ils sur leur page Facebook.
Shabir Ahmed, un policier de 32 ans envoyé à Quetta pour assurer la sécurité des vaccinateurs, attendait devant le centre le départ des équipes anti-polio qui devaient se diriger vers différentes zones à 10H du matin (05H00 GMT).
"Il y a eu un énorme boum, je suis tombé à terre (..) puis j'ai entendu des gens hurler et des sirènes d'ambulance", a-t-il raconté depuis son lit d'hôpital.
"J'ai essayé de retrouver mes collègues, mais ils étaient dispersés partout, certains morts et d'autres appelant à l'aide", ajoute le policier, qui a lui-même reçu des éclats d'obus dans le ventre et les jambes.
- Fausse campagne de la CIA -
Le Pakistan et l'Afghanistan voisin sont les deux derniers pays au monde où la polio est toujours endémique, et des dizaines d'enfants touchés restent paralysés chaque année.
Les campagnes de lutte contre la maladie sont entravées par des attaques meurtrières récurrentes contre les équipes de vaccination, qui sont rarement revendiquées.
Des groupes islamistes militent contre le vaccin, faisant circuler des rumeurs selon lesquelles il contiendrait du porc ou viserait à rendre stérile la population musulmane.
Les équipes de vaccination sont également accusées d'être des espions à la solde de l'Occident, surtout depuis que la CIA a organisé une fausse campagne de vaccination pour tenter de confirmer la présence d'Oussama Ben Laden à Abbottabad, au nord du Pakistan, où il a finalement été débusqué et tué par un commando américain en mai 2011.
Les attaques contre les équipes de vaccination se sont multipliées depuis la fin 2012, faisant près de 100 morts en comptant l'attaque de mercredi, principalement dans le nord-ouest et à Karachi, autre foyer de la maladie.
La dernière attaque en date a coûté la vie en novembre dernier au dirigeant d'un programme d'immunisation dans la province de Khyber Pakhtunkhwa (nord-ouest), tué par balles par deux assaillants inconnus.
La poliomyélite, causée par un virus qui prolifère dans des conditions sanitaires précaires, détruit le système nerveux, pouvant entraîner la paralysie et la mort.
Après des centaines de milliers de cas de polio à l'échelle mondiale dans les années 1980, environ 70 personnes ont été infectées en 2015 par le poliovirus sauvage qui touche principalement les jeunes enfants, selon l'Initiative globale pour l'éradication de la polio (GPEI). La quasi-totalité de ces cas ont été enregistrés au Pakistan.
Selon cette institution rassemblant les principaux acteurs de la lutte contre la polio, 2015 marque le plus bas nombre de nouveaux cas de polio jamais enregistré grâce à une spectaculaire baisse au Pakistan, ce qui laisse espérer une éradication du poliovirus sauvage en 2016.
Avec AFP