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Toujours pas de vainqueur connu de la présidentielle à Honduras


Les partisans du candidat opposant Salvador Nasralla manifestent contre la fraude électorale à Tegucigalpa, le Honduras, le 3 décembre 2017.
Les partisans du candidat opposant Salvador Nasralla manifestent contre la fraude électorale à Tegucigalpa, le Honduras, le 3 décembre 2017.

Un président sortant candidat malgré la Constitution, un dépouillement très lent, des accusations de fraude: au Honduras, ce cocktail explique les manifestations de colère et de violence, huit jours après une présidentielle toujours sans vainqueur officiel.

Lundi, les autorités électorales ont annoncé avoir enfin fini de dépouiller les bulletins, mais ont refusé de désigner un vainqueur en raison de possibles recours.

Les résultats donnent le président sortant de droite, Juan Orlando Hernandez, en tête avec 42,98% des voix, contre 41,39% à l'opposant de gauche et présentateur de télévision Salvador Nasralla.

Réélection polémique

Avant même sa tenue, le scrutin était contesté, en raison de la candidature du président sortant. La Constitution interdit deux mandats consécutifs, mais M. Hernandez s'est appuyé sur une décision de la Cour suprême l'autorisant à se représenter.

Les détracteurs du chef de l'Etat l'accusent d'avoir pris le contrôle de cette institution pour qu'elle penche en sa faveur.

Pour le sociologue et chercheur de l'Université nationale Eugenio Sosa, la tension autour du scrutin est due au fait que "la (possibilité de) réélection ait été imposée, puis validée par un Tribunal suprême électoral (TSE) en qui une grande partie de la société ne croit plus".

Lenteur du dépouillement

Dès la nuit du vote du 26 novembre, beaucoup s'étaient étonné du temps pris pour dévoiler les premières tendances. "Jamais" auparavant les résultats partiels n'ont tant tardé à être publiés, soulignait alors M. Sosa.

Et si les premiers chiffres donnaient M. Nasralla en tête, avec presque cinq points d'avance, au fil des jours et alors que le dépouillement progressait au compte-gouttes, M. Hernandez a rattrapé son retard puis viré en tête.

Immédiatement, les partisans de M. Nasralla sont descendus dans la rue pour crier à la "fraude" et au "vol" de cette élection.

Suspicions de fraude

Les accusations de fraude ne sont pas nouvelles: lors du scrutin précédent en 2013, la victoire de M. Hernandez face à Xiomara Castro avait été critiquée par ses adversaires, qui l'avaient attribuée à sa mainmise sur le TSE.

Cette fois, l'opposition accuse le TSE d'avoir falsifié des procès-verbaux pour favoriser le président sortant et dénonce les nombreuses pannes informatiques enregistrées dans le système, ce qui a endommagé selon elle plus de 5.000 procès-verbaux.

Pour Ramon Custodio, ex-commissaire national aux droits de l'homme, "le processus électoral actuel est nul à cause des manipulations du tribunal électoral et la démocratie n'existe plus au Honduras".

Ce que fait l'opposition, selon lui, "c'est prouver comment la fraude a été réalisée et c'est possible techniquement de le faire, si le tribunal remet toute les informations qu'elle lui réclame. Il est possible de prouver que le tribunal a inversé le résultat".

Mobilisation citoyenne

Ce climat de suspicion a entraîné de vastes manifestions d'opposants au président Hernandez, avec des affrontements violents avec la police. Au moins une jeune femme a été tuée et des commerces saccagés dans plusieurs villes du pays.

En réponse, le gouvernement a décrété vendredi l'état d'urgence pour dix jours, assorti d'un couvre-feu.

Ces mobilisations sont le reflet d'"une population mobilisée, qui ne reconnaît pas le président comme vainqueur, qui réclame la victoire de Nasralla et rejette les institutions", explique M. Sosa.

Derrière ce mouvement de colère il y a aussi "le mécontentement populaire face à la corruption, le chômage, la violence et les carences en matière d'éducation et de santé", ajoute le sociologue, dans ce pays pauvre miné par les gangs et affichant l'un des plus forts taux d'homicide au monde.

Et même "avec l'usage de la force et le contrôle des institutions, notamment de l'armée et la police, un président avec une légitimité détériorée aura moins de soutien et sa capacité à gouverner sera en danger", souligne Eugenio Sosa.

Avec AFP

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