Selon les experts, cette décision devrait servir à l'avenir de référence pour la coopération entre les Etats et la CPI.
Et elle mettra en lumière son incapacité à fonctionner sans le soutien de ses Etats-membres et l'appui du Conseil de sécurité de l'ONU. Car la Cour fondée en 2002 ne dispose pas de force de police propre pour arrêter les suspects qu'elle recherche.
"La décision est fondamentale pour l'exécution future" des demandes de la CPI, a déclaré Carsten Stahn, professeur de droit international en criminologie à l'Université de Leiden.
Si elle devait condamner l'Afrique du Sud, cette décision "enverrait l'important message que les Etats ne peuvent pas négocier (leurs) obligations en droit avec la Cour", a-t-il dit à l'AFP.
- Apre conflit -
Jamais inquiété jusqu'à présent, Omar el-Béchir est visé par deux mandats d'arrêt internationaux émis par la CPI en 2009 et 2010 pour génocide, crimes contre l'humanité et crimes de guerre commis au Darfour, province de l'ouest du Soudan en proie depuis 2003 à une guerre civile qui a fait 330.000 morts, selon l'ONU.
Même si ses déplacements sont réduits, le président soudanais continue de voyager dans certains pays sans être inquiété. Khartoum a d'ailleurs annoncé lundi qu'il se rendrait à Moscou pour la première fois en août en réponse à l'invitation de son homologue russe Vladimir Poutine.
Moscou a annoncé en novembre son intention de retirer sa signature du Statut de Rome, traité fondateur de la CPI que la Russie n'avait toutefois jamais ratifié.
Un âpre conflit sévit entre Pretoria et la CPI depuis qu'à la mi-juin 2015, les autorités sud-africaines ont laissé Omar el-Béchir rentrer chez lui après sa participation à un sommet de l'Union africaine à Johannesbourg.
En permettant à son avion de décoller d'une base militaire, le gouvernement sud-africain, qui avait l'occasion de l'arrêter, "a choisi de ne pas le faire", avait affirmé l'accusation en avril devant la Cour de La Haye.
Or, selon les avocats de Pretoria, "il n'est et n'était pas du devoir de l'Afrique du Sud, aux termes du droit international, d'arrêter le chef en exercice d'un Etat non membre (de la Cour) comme M. Béchir".
Evoquant son "rôle de pacificateur sur le continent", le gouvernement sud-africain assure en effet s'être retrouvé partagé entre le respect des règles de la CPI et celui de sa propre législation qui garantit l'immunité présidentielle.
- Zuma réitère -
Selon les experts, il est probable que les juges de la CPI considèrent que l'Afrique du Sud a manqué à ses obligations.
Mais "la manière et le ton de la décision seront de la plus haute importance", assure Mark Kersten, spécialiste en droit international de l'Université de Toronto.
"Il est possible, et c'est ce que beaucoup espèrent, que la décision témoigne d'un certain degré de compréhension et peut-être d'indulgence envers l'Afrique du Sud et suggère que le débat se poursuive en chambre d'appel", a-t-il expliqué à l'AFP.
Les juges pourraient également renvoyer l'affaire devant l'Assemblée des Etats Parties au Statut de Rome ou devant le Conseil de sécurité pour d'éventuelles actions supplémentaires.
Le président sud-africain Jacob Zuma a réitéré la semaine dernière les intentions de Pretoria de se retirer de la CPI, assurant être en train de "modifier les problèmes de procédure".
En février, la justice sud-africaine avait ordonné au gouvernement de revenir sur cette décision, jugeant "inconstitutionnelle et invalide" la lettre de retrait envoyée en octobre à l'ONU.
Le mois dernier, la procureure de la Cour Fatou Bensouda a renouvelé son appel au Conseil de sécurité pour qu'il soutienne les "efforts d'exécution des mandats d'arrêt".
Avec AFP