L’exploitation de l'or se fait de façon artisanale par des orpailleurs venus d’horizons divers, et même de l’étranger.
La population s’est ruée sur les douze sites où l’or a été découvert, malgré l’interdiction des autorités de la ville.
La piste qui mène à ce site est difficile d’accès. Seules les motos ou les piétons téméraires l’empruntent, bravant d’épaisses couches de poussière.
Ruée sur l’or
La recherche de l’or mobilise tout le monde, peu importe l'âge ou le sexe des chercheurs, à l’instar de Geroges, pelle en main, les pieds plongés dans les eaux boueuses du marécage.
"Je suis ici depuis trois semaines. J’ai pu trouver de l’or et jusque là, je ne me plains pas de mener cette activité", raconte à VOA Afrique Georges, la vingtaine à peine.
Sur le même site, Marie, 18 ans, recherche aussi de l’or. Dans une assiette, elle nous présente un dépôt noirâtre sorti de la fouille du jour.
Marie est pourtant courtière de profession. "La vie n’est pas facile, on cherche l’argent", explique t- elle pour justifier sa présence.
Le marécage est creusé à longueur de journée depuis plus d’un mois, quand l’or a été découvert. Les orpailleurs de circonstance ne ressortent pas de là bredouilles au bout d’intenses heures de travail.
À l’instar de Moluh, venu de Mbalmayo, à 83 kilomètres d’Eseka, avec sept de ses amis.
"Le gramme d’or est acheté à 15.000 francs CFA ($27), mais les collecteurs changent ce prix à leur guise", confie Moluh à VOA Afrique.
Ces jeunes paient en outre 2.000 francs CFA ($3,72) aux riverains qui réclament des droits sur "leur marécage". Cependant, l’activité "permet de subvenir à nos besoins", reconnaît le jeune Moluh.
Collecteurs d’or et les bonnes affaires
Hors du marécage, un marché s’est installé. À une centaine de mètres plus loin, les acheteurs d’or très méfiants attendent le précieux métal.
Idriss, l’un des acheteurs d’or sur le site de Ndjock, accepte de parler à VOA Afrique.
"L’activité se porte bien, mais il y a trop de désordre. Chaque riverain veut qu’on le paie. Comme le ministre a demandé qu’on se constitue en coopérative d’exploitants de l’or, nous sommes en train de nous organiser", a confié Idriss.
Il avoue toutefois que l’or qu’il achète à Eseka est de bonne qualité.
23.6 karas à Eseka
En août 2017, la délégation départementale des mines de l’industrie et développement technologique d’Eseka a été informée par un orpailleur individuel de la découverte de l’or non loin de son domicile.
Les autorités de la ville, puis de Yaoundé, ont vite pris des mesures conservatoires pour éviter l’anarchie dans l’exploitation de l’or.
"L’or pur, c’est 24 karas mais à Eseka c’est 23,6 karas. Nous ne sommes pas loin de l’or pur. Fort de cela, le préfet du Nyong et Kellé (chef lieu d'Eseka), a interdit l’exploitation de l’or. Il a demandé que les orpailleurs créent des coopératives.
La même directive avait été donnée par le ministre des mines en décembre 2017, au cours d’une descente sur le terrain sur les douze sites où l’exploitation artisanale de l’or s’opère.
À ce jour, la délégation départementale des mines dit avoir enregistré " sept coopératives de 50 personnes", révèle Alain Blaise Mbonji, chef service départemental des mines, de l’industrie et développement technologique à Eseka.
Lors d’une descente sur le terrain à Eseka, en décembre 2017.
Cinq mois après, la découverte de l’or, les dividendes sont évidents dans la ville d’Eseka sur le niveau de vie de la population.
Les bottes et pelles se vendent comme des petis pains. Les activités lucratives se portent bien. Les conducteurs de motos se frottent particulièrement les mains. Leurs recettes journalières ont quadruplé.
Après avoir été la ville du drame consécutif au déraillement survenu à la gare éponyme, Eseka est devenue la ville de l’or.
Pour le moment, les autorités peinent encore à contenir les milliers d’exploitants de la précieuse matière. La population s’est accrue, rendant le niveau de vie plus élevé qu’auparavant.
Emmanuel Jules Ntap, envoyé spécial à Eseka