Cet entretien était le premier de M. Trump avec un haut responsable russe, alors que les relations entre les deux puissances sont exécrables et que le climat politique à Washington est explosif.
Il est rare qu'un ministre des Affaires étrangères, ou un officiel qui n'est pas un chef d'Etat ou de gouvernement, soit reçu par le président américain dans le Bureau ovale.
"Je pense que nous allons faire de très bonnes choses sur la Syrie, les choses bougent, c'est très positif", a déclaré M. Trump à l'issue de cette rencontre, une fois M. Lavrov parti.
"Nous avons eu une très très bonne rencontre avec (M.) Lavrov", a-t-il ajouté, en présence de l'ex-secrétaire d'Etat Henry Kissinger, 93 ans.
La Russie s'est empressé de publier une première photographie de la rencontre, fermée à la presse :
Le ministre russe des Affaires étrangères, qui a déjà vu deux fois en trois mois M. Tillerson, à Bonn (Allemagne) et Moscou, n'était pas revenu à Washington depuis août 2013. A l'époque, il s'agissait déjà, avec le secrétaire d'Etat d'alors John Kerry, de trouver un moyen d'arrêter la guerre en Syrie.
Le conflit a fait depuis mars 2011 plus de 320.000 morts, déplacé plus de la moitié de la population et provoqué la fuite de millions de réfugiés sans que ni Washington, soutien de l'opposition, ni Moscou, allié du régime syrien, n'aient réussi à s'entendre pour faire cesser les massacres.
Etats-Unis en retrait
A la fin de la présidence de Barack Obama (2009-2017), les Etats-Unis s'étaient même progressivement mis en retrait du processus diplomatique et avaient laissé la Russie prendre la main.
Jeudi dernier à Astana, la Russie, la Turquie et l'Iran ont paraphé un projet russe visant à faire baisser le niveau des violences en Syrie. Entrée en vigueur samedi, cette proposition prévoit quatre "zones de désescalade", doublées de "zones de sécurité" avec des postes de contrôle et centres de surveillance tenus par les forces de pays garants et éventuellement par "d'autres parties".
Les Etats-Unis, qui n'étaient qu'observateurs à Astana, ont accueilli ce projet avec la plus grande prudence, leur secrétaire à la Défense James Mattis assurant lundi qu'ils "allaient regarder la proposition et voir si elle fonctionne".
Tous les accords de cessez-le-feu en Syrie ont périclité, notamment les derniers négociés par MM. Kerry et Lavrov et consacrés par des résolutions de l'ONU.
Depuis six ans, Moscou et Washington ont eu de multiples désaccords sur le conflit en Syrie, la principale pierre d'achoppement demeurant le sort du président Bachar al-Assad. L'arrivée de Donald Trump n'a finalement pas permis de rapprocher leurs positions, les Etats-Unis bombardant même début avril une base aérienne du régime syrien en représailles à une attaque chimique qui lui a été imputée.
Les deux anciens adversaires de la Guerre froide, aux liens particulièrement tendus sous l'ère Obama, ont reconnu tous deux récemment que sous l'administration Trump, les relations n'avaient jamais été aussi mauvaises.
'Désescalade' en Syrie
Venu lundi à New York (nord-est des Etats-Unis) pour voir le numéro deux de la diplomatie américaine Thomas Shannon, le vice-ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Riabkov a affirmé que Moscou s'attendait "avant tout à parvenir à une compréhension commune de la nécessité d'un régime de désescalade en Syrie".
"Si nous parvenons à trouver (...) une position commune avec les Etats-Unis sur cette question, ce sera le résultat le plus important des prochaines discussions", a-t-il souligné, cité par l'agence russe Interfax.
De son côté, le département d'Etat s'est borné à dire que MM. Tillerson et Lavrov parleraient des "efforts pour une désescalade de la violence, l'acheminement d'une assistance humanitaire au peuple syrien et la préparation du terrain pour un règlement politique du conflit".
Les deux ministres devraient aussi évoquer l'Ukraine - un conflit qui empoisonne également les relations depuis 2014 - notamment "la nécessité d'arrêter la violence (...) en mettant entièrement en œuvre les accords de Minsk".
L'Américain et le Russe devraient se revoir jeudi à Fairbanks, en Alaska (nord-ouest), autour de la table du Conseil de l'Arctique, un forum intergouvernemental de coopération en matière d'environnement, d'exploitation pétrolière et minière, de trafic maritime, de pêche et de tourisme. Il réunit les huit pays riverains de l'océan Arctique (Canada, Russie, Norvège, Danemark, États-Unis, Islande, Suède et Finlande) et Washington le préside pour la période 2015-2017.
Clin d’œil de l'Histoire, le Conseil de l'Arctique se réunit en Alaska, un Etat américain du nord-ouest du continent que Washington avait acheté à Moscou il y a exactement 150 ans.
Avec AFP