Entre les Nations unies et la Corée du Nord, le bras de fer se durcit sur fond de propos belliqueux du président américain Donald Trump promettant "feu" et "colère" à son homologue nord-coréen Kim Jong-Un.
Si les experts restent dubitatifs sur l'efficacité des nouvelles sanctions touchant aux exportations nord-coréennes - fer, charbon, pêche... - pour contraindre le régime à renoncer à ses programmes d'armement conventionnel et nucléaire, des diplomates à l'ONU jugent qu'elles seront davantage appliquées que par le passé.
Et notamment par la Chine, pays vers lequel convergent environ 90% des exportations nord-coréennes, selon l'agence gouvernementale sud-coréenne Kotra, et souvent suspecté de ne pas appliquer à la lettre les résolutions de l'ONU, même lorsque Pékin vote en leur faveur.
"Les Etats membres doivent fournir régulièrement des rapports sur leur application des sanctions", explique sous couvert d'anonymat un diplomate au fait du dossier. "Dans le passé, la Chine n'envoyait pas grand chose. Maintenant si, elle collabore davantage". "La tendance est à l'application", abonde un autre diplomate.
Comme en écho, le ministre chinois des Affaires étrangères, Wang Yi, a affirmé lundi que la Chine allait "assurément appliquer la nouvelle résolution à 100%, pleinement et strictement".
Si tel est le cas, la Corée du Nord pourrait être tentée de commercer via d'autres pays et la Thaïlande vient d'être sermonnée par les Etats-Unis sur la nécessité d'un cordon réellement étanche pour les exportations nord-coréennes visées par les sanctions onusiennes.
Souvent décrié pour affecter davantage les populations que leurs dirigeants, le régime de sanctions auquel a eu recours l'ONU dans l'Histoire a eu des conséquences favorables en Afrique du Sud pour supprimer l'apartheid ou plus récemment en Iran pour obtenir un accord sur son programme nucléaire. Les sanctions s'inscrivent cependant sur un temps parfois très long - plus d'une dizaine d'années dans le cas de l'Iran - pour avoir des conséquences et modifier des positions.
- 'Défi' -
Dans le dossier nord-coréen, "l'impact des sanctions jusqu'à présent pour obtenir un changement d'attitude de la Corée du Nord semble être limité", note Alexander Gabuev, expert de l'Institut Carnegie à Moscou. Lorsqu'il s'agit de sanctions économiques, la Russie "a une position ambigüe" car elles "étranglent" sa coopération avec la Corée du Nord "et se heurtent à des intérêts d'acteurs puissants" comme les chemins de fer russes, ajoute-t-il dans une analyse récente.
Parmi les dernières mesures adoptées le 5 août par l'ONU, qui dans leur globalité pourraient priver Pyongyang d'un milliard de dollars de recettes annuelles, le commerce de poissons et de crustacés est spécialement visé. Quelque 29% des exportations nord-coréennes dans ce secteur ont pour destination la Russie. Selon les douanes chinoises, Pékin a importé pour le seul mois de juin des poissons et des crustacés pour une valeur de près de 50 millions de dollars.
"Les nouvelles sanctions sont un défi", reconnaît-on à l'ONU. Mais "depuis un an, le niveau de vérification est monté, il y a davantage d'application des sanctions et de communication entre les Etats membres", veut-on croire de sources diplomatiques.
Comme plusieurs autres experts, Thomas H. Lee, professeur de droit à la Fordham Law School à New York, considère que la mise en oeuvre des sanctions contre la Corée du Nord par les membres des Nations unies est restée à ce jour "limitée". Mais les nouvelles mesures adoptées samedi "vont réellement nuire aux dirigeants nord-coréens", prédit-il.
Et si cela ne suffit pas pour obtenir un changement d'attitude, le Conseil de sécurité a en réserve d'autres mesures, assure un diplomate occidental sous couvert d'anonymat, alors qu'ont été évoqués dans le passé un possible embargo sur le pétrole et le renvoi en Corée du Nord de ses ressortissants travaillant à l'étranger.
Un nouveau rapport sur l'application des sanctions de l'ONU contre la Corée du Nord est attendu en septembre.
Avec AFP