"Nous avons la sécurité seulement depuis Sissi", élu président en 2014, affirme à l'AFP Tarek Mohamed Hafez, un marchand de bétail d'une quarantaine d'année, portant la traditionnelle galabeya du sud égyptien.
Au milieu d'un vaste champ poussiéreux, M. Hafez vend ses vaches dans ce petit village de la province de Qena, s'abritant du soleil sous un tissu tendu entre quelques piquets de bois.
"Nous n'avions aucune espèce de sécurité, les femmes ne pouvaient même pas sortir pour aller chez le docteur", raconte M. Hafez en parlant de la période de chaos qui a suivi la révolution de janvier 2011 ayant provoqué la chute du président Hosni Moubarak.
'Tout est cher'
M. Sissi, qui brigue un nouveau mandat de quatre ans dans le scrutin des 26, 27, 28 mars, aura face à lui un unique candidat, qui est aussi l'un de ses plus fervents soutiens.
>> Lire aussi : Sissi appelle à voter mais nie avoir exclu l'opposition en Egypte
Méconnu au Caire, Moussa Mostafa Moussa, l'adversaire du président, l'est davantage en Haute-Egypte. Il s'est présenté à la dernière minute après que plusieurs autres candidats ont été arrêtés ou découragés, évitant ainsi au président d'avoir à se présenter seul.
Le président sortant, ancien chef de l'armée, avait été élu la première fois en 2014 avec 96,9% des voix, un an après avoir destitué son prédécesseur islamiste Mohamed Morsi à la faveur de manifestations de masse.
"Personne ne conviendra, sauf Sissi", assure le marchand de bétail tout en demandant au président de "s'occuper de la santé, car les hôpitaux tombent en ruines".
Dans ce marché du mercredi, la plupart des commerçants affichent publiquement leur soutien à M. Sissi pour le prochain scrutin.
Assis sur un banc devant sa maison face au Nil, Hussein Hafez, un retraité de la fonction publique, est du même avis. "Nous ne connaissons pas l'autre candidat, et lui-même (Mostafa Moussa) a dit qu'il voterait pour Sissi", souligne-t-il.
Indépendamment de la situation sécuritaire dans le sud, d'autres comme Adib Halim Beksamos, un mécanicien de 72 ans, évoquent leurs difficultés économiques.
"Les paysans perdent de l'argent car tout est devenu cher... l'électricité est devenue chère, de même que les pesticides", explique M. Beksamos.
En vue de l'obtention d'un prêt de la part du Fonds monétaire international de 12 milliards de dollars sur trois ans, le gouvernement de M. Sissi a décidé de laisser flotter la livre égyptienne, entraînant une forte inflation.
Selon lui, la récolte d'un feddan (0,42 hectare) de laitue se vendait, avant la dévaluation de la devise égyptienne en novembre 2016, 10.000 livres (environ 1.000 euros à l'époque) et se vend désormais 3.000 livres (environ 150 euros).
"M. Sissi est un homme bon et tout ce qu'il a fait était bon, mais la hausse des prix est terrible et je me demande s'il peut rendre (les prix) plus abordables, car les travailleurs n'ont pas assez pour vivre", déplore le septuagénaire dans sa galabeya grise de travail.
Outre la dévaluation, les autorités ont mis en place une taxe sur la valeur ajoutée, réduit les subventions d'Etat sur le gaz et l'essence, et augmenté les prix de l'électricité.
Environ 28% des 96,6 millions d'Egyptiens vivent sous le seuil de pauvreté, et le taux de pauvreté dépasse 50% dans certaines régions du sud, selon des chiffres officiels.
'Pourquoi voterais-je?'
A 70 km au nord d'Abou Choucha, à Sohag, capitale de la province du même nom, les affiches de soutien au président Sissi sont moins nombreuses qu'au Caire. Quant à celles de son adversaire, elles sont inexistantes.
>> Lire aussi : Ces Egyptiens du Printemps arabe qui n'iront pas voter
Dans cette grosse bourgade de plusieurs centaines de milliers d'habitants, nombreux sont ceux qui mettront un bulletin Sissi dans l'urne lundi.
Maher Bechai, 66 ans, vendeur de matériel cycliste, affirme qu'il votera pour lui "pour un, deux, trois ou quatre mandats, car il veut construire notre pays".
D'autres sont un peu moins enthousiastes.
"J'espérais juste pouvoir choisir entre plusieurs candidats", explique un employé de pharmacie qui a préféré garder l'anonymat pour des raisons de sécurité.
Othman, 21 ans, qui travaille dans une usine de briques, ne montre pas un grand intérêt pour l'élection. "J'ai mon travail, je soutiens (financièrement) mes frères et soeurs, ma femme... Je ne sais pas comment le pays est dirigé, donc pourquoi voterais-je et que vaudrait mon opinion?"
Avec AFP