Ecrasés par un déluge de feu et affaiblis par un siège de cinq ans, les mouvements rebelles acceptent un à un d'abandonner leurs positions dans la Ghouta pour se retirer dans la province d'Idleb (nord-ouest), qui échappe encore au contrôle du régime.
Un premier convoi de vingt-six bus a quitté dimanche en l'enclave à destination d'Idleb, à la suite d'un accord parrainé par la Russie, allié du régime syrien, a constaté un correspondant de l'AFP.
Au total, 5.247 combattants accompagnés de leurs familles et d'autres civils sont montés à bord de 77 bus au départ de la Ghouta, selon l'agence officielle Sana.
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"J'ai décidé de partir pour sauver la vie de ma femme et de mes enfants. Mais je reviendrai dans la Ghouta combattre le régime", a promis Abou Mohamad, un rebelle de 27 ans.
Les bus manoeuvraient difficilement dans les rues dévastées de la Ghouta, tandis que des habitants ayant fait le choix de rester saluaient de la main, émus, leurs voisins quittant la région.
Comme la veille, les candidats au départ étaient fouillés -les combattants doivent abandonner la plus grande partie de leur armement- et un soldat russe avait pris place à bord de chaque bus, Moscou supervisant directement l'opération.
Avenir détruit
Leurs biens rassemblés dans des sacs en toile et des valises chargées à ras bord, combattants vêtus de noir et civils ont embarqué dans des bus dans la ville d'Arbine tout au long de la journée.
Beaucoup pleuraient. "Nous abandonnons nos foyers, nous n'avons plus d'argent, plus de maison, même plus de vêtements à emporter à cause des bombardements", a témoigné Hamza Abbas, un civil.
Mais pour lui, hors de question de rester sur place, comme le permet un accord dit de "réconciliation": "J'ai décidé de partir. Comment accepter de vivre avec ceux qui ont massacré ma famille et mes amis? Qui ont détruit mon avenir?".
Samedi, près de 1.000 combattants rebelles de Faylaq al-Rahmane et leurs familles avaient déjà quitté Arbine et les autres localités environnantes. Cet accord inclut aussi le quartier damascène de Jobar, également contrôlé par le groupe.
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Lorsque cette évacuation de masse sera terminée, les rebelles ne seront plus présents que dans une seule poche dans la Ghouta, autour de la grande ville de Douma, tenue par le groupe islamiste Jaich al-Islam et où des négociations sont en cours.
N'attendant pas leur issue, plus d'un millier d'habitants de cette ville ont choisi dimanche de fuir vers les zones contrôlées par le régime, selon les médias officiels syriens. Quelque 15.000 habitants avaient déjà choisi cette option ces cinq derniers jours, selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH).
En tout, plus de 107.000 habitants des zones rebelles de la Ghouta, vaste plaine agricole à l'est de Damas, ont fui en une dizaine de jours vers les zones gouvernementales depuis le lancement, le 18 février, d'une offensive des forces du président Bachar al-Assad. L'enclave rebelle comptait environ 400.000 habitants avant le début de l'offensive.
Victoire emblématique
Plus de 1.600 civils ont été tués par les bombardements du régime, selon l'OSDH, qui a aussi dénombré la mort d'au moins 485 soldats gouvernementaux et de 310 rebelles.
Le premier accord d'évacuation de rebelles de la Ghouta vers d'autres zones insurgées a été conclu la semaine dernière pour la poche de Harasta. Environ 4.500 personnes, dont 1.400 combattants du groupe salafiste Ahrar al-Cham, ont été transférés vers Idleb.
"Tout ce qu'ils ont obtenu, c'est de pouvoir partir sans être tués", a dit Nawar Oliver, expert au centre de réflexion Omran, basé en Turquie.
Le régime syrien avait fait en début d'année une priorité de la reconquête de la Ghouta orientale, une zone d'où les rebelles tiraient obus et roquettes meurtriers sur Damas. Samedi, un adolescent de 12 ans a été tué par un de ces tirs, selon Sana.
La Ghouta a été l'une des premières régions où se sont déroulées des manifestations contre le régime, en 2011, dans le contexte du Printemps arabe.
"Les habitants de Damas raconteront à leurs enfants pendant les décennies à venir comment vous avez sauvé la ville", avait proclamé mi-mars le président syrien, s'adressant aux troupes impliquées dans l'offensive sur la Ghouta.
La guerre en Syrie a fait depuis 2011 plus de 350.000 morts et conduit des millions de personnes à l'exil.
Avec AFP