Vingt-quatre heures après les faits, le ministre de l'Intérieur Efkan Ala a affirmé que le kamikaze qui s'est fait exploser sur l'avenue Istiklal, une artère fréquentée chaque jour par des centaines de milliers de personnes, était un Turc né en 1992, Mehmet Öztürk.
"L'auteur a été formellement identifié. Il a des liens avec l'organisation terroriste Daech (acronyme arabe de l'EI)", a indiqué M. Ala devant la presse, précisant qu'il ne "figurait pas dans notre liste de personnes recherchées".
Cinq suspects ont également été arrêtés dans le cadre de l'enquête, a-t-il ajouté.
Selon l'agence de presse Dogan, le père et le frère de l'auteur de l'attentat, originaire de la ville de Gaziantep (sud), ont été placés en garde à vue.
L'attentat n'a pas été revendiqué mais la police a rapidement privilégié la piste jihadiste. Le suspect a d'abord été identifié dans la presse proche du gouvernement comme Savas Yildiz, 33 ans, avant que les enquêteurs ne portent leurs soupçons sur Mehmet Öztürk, formellement identifié par empreinte génétique.
L'agence Dogan a précisé que les deux hommes étaient liés.
Selon le dernier bilan turc, trois Israéliens, dont deux ayant également la nationalité américaine, et un Iranien ont trouvé la mort et 39 autres personnes, dont 24 étrangers, ont été blessées par la déflagration.
Le ministère de la Santé a précisé que 15 blessés étaient toujours hospitalisés dimanche à la mi-journée dans différents hôpitaux d'Istanbul, dont quatre en soins intensifs.
L'équivalent israélien de la Croix-Rouge a annoncé dimanche avoir rapatrié à bord de deux avions cinq ressortissants de l'Etat hébreu légèrement atteints. Les victimes faisaient partie d'un groupe qui effectuait un voyage culinaire, selon les médias israéliens.
Au lendemain de l'attaque, Israël a recommandé dimanche à ses ressortissants de ne plus se rendre en Turquie "au vu de l'aggravation de l'intensité des attentats en Turquie dans des sites touristiques et des secteurs très fréquentés (...) et par crainte de nouveaux attentats", selon son bureau de lutte contre le terrorisme.
- Vague d'attentats -
La Turquie vit en état d'alerte permanente depuis l'été dernier et une série inédite d'attentats meurtriers attribués par son gouvernement à l'EI qui ont frappé ses deux plus grandes villes, Istanbul et Ankara.
En octobre, deux kamikazes avaient fait 103 morts à Ankara en se faisant exploser au milieu d'une foule de partisans de la cause kurde réunie devant la gare centrale. Puis en janvier, un autre avait tué 12 touristes allemands près de la Mosquée bleue à Istanbul.
Longtemps soupçonnée par ses alliés de complaisance avec les groupes les plus radicaux qui combattent le régime syrien, Ankara a rejoint l'été dernier la coalition antijihadiste internationale et multiplié les arrestations dans les milieux proches de l'EI.
Le pays est en outre secoué depuis des mois par la reprise du conflit kurde.
Il y a une semaine, une attaque suicide à la voiture piégée a fait 35 morts et plus de 120 blessés dans le centre de la capitale turque Ankara.
Un groupe radical et dissident du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) l'a revendiquée et annoncé d'autres opérations à venir contre l'Etat turc, pour venger la mort de dizaines de civils lors des opérations des forces de sécurité en cours contre la rébellion dans les villes du sud-est à majorité kurde du pays.
Cette vague de violences, ainsi que la brouille diplomatique entre Ankara et Moscou autour de la crise syrienne, ont causé une chute des réservations touristiques en Turquie.
L'attaque de l'avenue Istiklal a provoqué un nouveau choc dans le pays.
La célèbre avenue est restée anormalement peu fréquentée dimanche, tout comme l'emblématique place Taksim toute proche. "On ne sait jamais où cela peut arriver et nous avons peur", a confié samedi après l'attaque le cuisinier d'un restaurant du quartier, Ismaïl, "c'est terrifiant".
Samedi soir, le Premier ministre Ahmet Davutoglu, qui ne s'est toujours pas exprimé publiquement, a promis de "continuer à combattre toutes les formes de terrorisme".
Depuis plusieurs jours, le président turc Recep Tayyip Erdogan est mis en cause par ses détracteurs, qui lui reprochent l'incapacité des services de sécurité face à cette vague d'attentats. Embarrassé, il a en retour mis a mis en cause vendredi la complaisance des Européens pour la rébellion kurde.
Avec AFP