Cette fois plus d'atermoiement possible. Après des semaines de valse-hésitation, de multiples reports ces derniers jours, les conservateurs de la chancelière et le SPD doivent trancher car ils se sont fixés la fin de journée comme date-butoir finale.
"Nous avons absolument besoin de la journée" de mardi compte tenu des désaccords persistants, a déclaré un des négociateurs du parti démocrate-chrétien (CDU) de la chancelière, Daniel Günther.
Malgré tout "je reste optimiste sur le fait que nous y arriverons mardi", a-t-il ajouté. Une proche d'Angela Merkel, Julia Klöckner, n'a pas exclu elle une conclusion des tractations dans la nuit, avec présentation d'un contrat de coalition complet mercredi.
Après quatre mois d'impasse post-électorale inédite depuis la guerre dans la première économie européenne, la chancelière est dos au mur.
Les élections législatives de septembre, marquées par un repli des partis traditionnels et une percée de l'extrême droite, n'ont pas permis de dégager une majorité claire à la chambre des députés.
- Accord sur l'Europe -
Après un premier échec pour former une coalition hétéroclite avec les Libéraux et les écologistes en novembre, Angela Merkel est réduite à expédier les affaires courantes depuis octobre et a vu son étoile pâlir sur la scène internationale.
Elle doit à présent s'entendre avec les sociaux-démocrates pour espérer un quatrième mandat.
Un accord a été trouvé sur plusieurs dossiers, à commencer par l'Europe, où les deux camps sont prêts à soutenir sur le principe les propositions de réforme du chef de l'Etat français Emmanuel Macron.
Selon le président du SPD Martin Schulz, le compromis est "pour un budget d'investissement pour la zone euro", sujet pourtant sensible en Allemagne.
Le président du SPD a même proclamé "la fin du diktat des économies" budgétaires en Europe. Reste à voir ce que le contrat de coalition allemand dira précisément sur le sujet.
Mais d'autres sujets de politique intérieure continuent de poser problème: la santé et le marché du travail.
Les sociaux-démocrates réclament une réduction des inégalités entre caisses publiques et privées d'assurance maladie et un moindre recours aux contrats à durée déterminée. Sur ces deux points, les conservateurs restent fermes.
Les deux camps ne sont pas non plus d'accord sur le niveau des dépenses militaires, au moment où l'Allemagne est au sein de l'Otan sous pression des Etats-Unis de Donald Trump pour délier les cordons de la bourse.
- SPD fragilisé -
Les sociaux-démocrates doivent à tout prix obtenir des concessions visibles pour prix de leur alliance, sous peine de voir leur base rejeter au final l'accord de coalition.
Car en cas d'accord avec les conservateurs, les 440.000 militants du parti auront le dernier mot lors d'un vote interne qui pourrait s'achever début mars.
Et ils restent très divisés sur l'opportunité même d'une nouvelle coalition avec les conservateurs, avec qui ils ont déjà gouverné dans les périodes 2005-2009 et 2013-2017.
S'ils devaient rejeter l'accord, la chancelière devrait soit se résoudre à un instable gouvernement minoritaire, soit accepter l'organisation de nouvelles élections à haut risque qui pourraient profiter avant tout à l'extrême droite. Chacun des deux scénarios serait une première en Allemagne depuis 1945.
En cas de succès, le quatrième mandat d'Angela Merkel s'annonce d'ores et déjà compliqué. Certains médias allemands ironisent sur la "coalition des perdants".
Les sociaux-démocrates sont au plus mal. Après avoir déjà enregistré aux dernières législatives son pire score d'après-guerre (20%), le plus vieux parti d'Allemagne continue depuis des semaines à reculer dans les sondages.
Il n'est crédité que de 17% dans une enquête INSA cette semaine, en passe d'être rattrapé par l'extrême droite (15%).
Les conservateurs reculent eux aussi, à 30,5%. Ensemble, les deux mouvements ne représentent déjà plus la majorité des Allemands, du jamais vu dans les sondages. Et ce avant même d'avoir commencé à gouverner.
Avec AFP