Un type populaire mais controversé d'insecticide nuit aux populations d'abeilles sauvages, selon une nouvelle étude. Or, ces abeilles sont des pollinisateurs essentiels des cultures et des écosystèmes sauvages.
Les experts environnementaux sont fermes, que cela soit aux Etats-Unis ou en Europe : les néonicotinoïdes, des produits chimiques, nuisent aux abeilles sauvages, et déciment leurs populations.
Il s’agit d’une classe d'insecticides agissant sur le système nerveux central des insectes. Les néonicotinoïdes sont parmi les insecticides les plus utilisés à travers le monde. Ils présentent trois caractéristiques: une très haute toxicité pour les insectes ; des propriétés systémiques qui les rendent présents dans tous les compartiments de la plante traitée et une très longue persistance dans l'environnement.
Les néonicotinoïdes intègrent le pollen et le nectar des plantes, et c’est ainsi que les abeilles entrent en contact avec ces molécules. Pour les apiculteurs, cela explique le syndrome d’effondrement des colonies d’abeilles.
« Je soupçonne que nous avons sous-estimé l’importance des pesticides dans le déclin des abeilles sauvages », explique le Dr Maj Rundlöf de l’université de Lund en Suède.
Dans une nouvelle étude publiée par la revue Nature, elle détaille ses travaux sur des abeilles observées dans des champs de colza. La moitié de ces champs avaient été traités avec des néonicotinoïdes, l’autre pas.
« Le résultat le plus dramatique que nous avons découvert, c’est que les colonies d’abeilles ne se développaient pratiquement pas sur les sites traités, comparé aux sites libres de ces pesticides », explique le Dr Rundlöf.
En gros, on détectait 50 % de moins d’abeilles sauvages par mètre carré dans les champs traités, comparé aux autres champs. « C’était vraiment assez dramatique dans cette etude. C’était très clair », souligne Dennis vanEngelsdorp, entomologiste à l'Université du Maryland, qui n’a pas participé aux travaux.
Une bonne nouvelle : l’étude semble indiquer que les néonicotinoïdes n’affectent pas les ruches d'abeilles domestiquées. Ce qui pourrait néanmoins poser un problème, ajoute M. vanEngelsdorp, car leur bien-être relatif pourrait cacher des séquelles, les recherches étant loin d’être exhaustives.
Mais si les néonicotinoïdes posent un danger pour les abeilles sauvages, les interdire n’est pas forcément la solution.
« Dans nombre de cas, ces insecticides sont en fait l’alternative la moins dangereuse. En les interdisant, vous forcez les fermiers à utiliser des produits tout aussi dangereux, ou pires », explique M. vanEngelsdorp. Toujours selon l’entomologiste, mieux vaut réfléchir à l’emploi de pesticides, et ne les utiliser que lorsqu’ils sont indispensables.