Près d'un mois après l'adoption à l'unanimité d'une résolution censée priver la Corée du Nord d'un milliard de dollars tirés de ses exportations, le Conseil de sécurité des Nations unies est resté uni mardi en condamnant le dernier tir de missile nord-coréen, qui a survolé le Japon et ravivé la crise après un bref répit.
Mais malgré l'entente ainsi affichée par les Etats-Unis, la Chine et la Russie, aux intérêts souvent divergents, la condamnation unanime n'est pas forcément le prélude à de nouvelles sanctions. S'il "y a eu des appels en séance" en ce sens, "rien n'est encore sur la table", résume une source diplomatique sous couvert d'anonymat.
Selon elle, "sur le fond, les positions restent les mêmes" malgré le "nouveau palier" que représente le tir au-dessus du Japon: certains comme les Etats-Unis "poussent pour davantage de fermeté", quand d'autres, dont Pékin, principal allié de Pyongyang, et Moscou, "demandent de dialoguer" avec la Corée du Nord et "d'éviter les provocations".
Le secrétaire d'Etat américain Rex Tillerson a multiplié les messages en faveur de discussions directes sur une dénucléarisation de la péninsule coréenne, une fois que le régime de Kim Jong-Un aura observé une période suffisante de retenue.
Or, le dernier tir pourrait doucher les espoirs des partisans d'un tel dialogue: "Discuter n'est pas la solution!", a ainsi lancé mercredi Donald Trump sur Twitter.
Cela signifie-t-il que le président américain entend passer à l'option militaire et abattre "le feu et la colère" sur le régime nord-coréen, comme promis récemment? Plusieurs responsables américains écartent cette idée.
- 'Prochaine sur la liste' -
Alors va-t-il davantage prêter l'oreille à ceux qui, à Washington, lui conseillent de prendre des sanctions unilatérales, dites secondaires, contre des entreprises, établissements financiers ou personnes soupçonnés de commercer avec la Corée du Nord?
Anthony Ruggiero, chercheur au sein du groupe de pression conservateur Foundation for Defense of Democracies, en est persuadé. Cet ancien haut fonctionnaire, expert en sanctions financières, se démarque de l'opinion communément répandue selon laquelle la politique nord-coréenne de Donald Trump ressemble à celle de ses prédécesseurs, les déclarations tonitruantes en plus. "L'administration Trump a pris au moins six mesures distinctes, contre des sociétés, individus ou banques chinois", ce que Barack Obama ou même George W. Bush "rechignaient à faire", souligne-t-il.
Le département américain du Trésor a ainsi adopté la semaine dernière de nouvelles sanctions en désignant dix entreprises et six personnes, Chinois et Russes, accusés d'apporter leur aide financière à Pyongyang. Et il a promis "d'accroître sa pression" en "visant ceux qui soutiennent le développement des programmes nucléaire et balistique". Les sanctions visent en particulier des importateurs de charbon, dont la société chinoise Zhicheng.
"Si j'étais un haut responsable d'une banque chinoise, je commencerais à m'inquiéter, car elle sera très clairement la prochaine sur la liste" à être frappée par "des amendes importantes ou des actions en justice", estime Anthony Ruggiero.
Depuis son arrivée à la Maison Blanche en janvier, Donald Trump fait pression sur la Chine pour qu'elle use de son influence supposée sur la Corée du Nord, soufflant le chaud et le froid sur Pékin au gré des événements. Mais de telles sanctions risquent de froisser Pékin, s'inquiètent des diplomates américains et des observateurs.
Favorable à des mesures contre des banques, Tom Malinowski, ancien haut responsable du département d'Etat dans l'administration de Barack Obama, prévient qu'il "faut faire attention à ce que les sanctions soient ciblées contre les activités qui bénéficient directement au régime nord-coréen et aux programmes balistique et nucléaire".
"Il ne faut pas essayer de tuer tout échange et communication entre la Corée du Nord et la Chine, car c'est ce qui permettra in fine d'apporter du changement en Corée du Nord", a-t-il estimé lors d'un colloque la semaine dernière à Washington.
Anthony Ruggiero minimise de son côté les risques que comporterait un tour de vis draconien: "il y a beaucoup de rhétorique", "mais les Chinois ne vont pas réagir aussi durement que tout le monde le dit".
Avec AFP