Robert Mugabe, qui semblait indéboulonnable après trente-sept années passées à la tête du pays, a démissionné le 21 novembre après un coup de force militaire.
Mais son parti, la Zanu-PF, détient toujours le pouvoir. M. Mnangagwa, qui a remplacé le nonagénaire à la tête de l'Etat, est un pur produit de la formation politique.
Ancien ministre et vice-président, il n'était que récemment tombé en disgrâce aux yeux du couple Mugabe. Pour la très ambitieuse Première dame, Grace, il était devenu un concurrent sur sa route vers la succession de son mari.
C'est précisément pour barrer la route à Grace Mugabe que l'armée est intervenue mi-novembre, avec le soutien de la population et des caciques de la Zanu-PF.
Le "principal objectif" du congrès vendredi à Harare est "d'approuver" Emmerson Mnangagwa au poste de président du parti et de confirmer son statut de "seul candidat présidentiel" de la Zanu-PF pour les élections générales de 2018, a expliqué à l'AFP son porte-parole, Simon Khaya Moyo.
Lors de la crise du mois dernier, le comité central du parti avait en urgence nommé Emmerson Mnangagwa à sa tête, après avoir précipitamment lâché le "camarade Bob".
L'adoubement vendredi par le congrès d'Emmerson Mnangagwa, surnommé le "crocodile", devrait être une pure formalité.
Le congrès doit lui permettre d'asseoir son autorité sur l'appareil d'un mouvement qui se déchirait entre deux factions: les partisans de Grace Mugabe, surnommés le G40 pour "Génération 40", et ceux de M. Mnangagwa, suronmmés les "Lacoste", en référence à la marque de vêtements symbolisée par un crocodile.
"Le congrès va entériner le triomphe des Lacoste sur le G40", a prédit à l'AFP Takavafira Zhou, professeur de sciences politiques à l'université d'Etat de Masvingo (Zimbabwe).
- 'Expérience militaire' -
Il doit aussi permettre de "créer une base pour voler de nouveau les élections", a-t-il accusé.
Les scrutins de l'ère Mugabe ont été largement entachés de fraudes et de violences contre des militants de l'opposition.
Le congrès va également être l'occasion de "réintégrer les anciens combattants dans la structure du parti", selon M. Zhou.
La puissante organisation des "anciens" de la guerre d'indépendance a joué un rôle déterminant dans la récente crise en lâchant l'ancien président qu'elle avait jusque-là soutenu.
"On va voir, dans les structures de la Zanu-PF, plus de gens avec une expérience militaire et des anciens combattants", a assuré Takavafira Zhou.
A la veille du congrès, M. Mnangagwa a assuré jeudi devant son parti que le gouvernement "ferait tout son possible pour que les élections soient crédibles, justes et libres".
Il a aussi appelé le parti à l'unité. "Nous ne pouvons pas nous permettre d'être divisés" alors que la priorité est de relancer une économie moribonde depuis plus d'une décennie, a-t-il déclaré.
"Nous n'accepterons plus la corruption qu'on a observée ces dernières années dans notre pays", a-t-il promis.
Robert Mugabe ne participera pas à ce congrès, il est en déplacement à Singapour pour un contrôle médical.
- 'Vernis' -
Les nominations dans l'état-major de la Zanu-PF auxquelles doit procéder M. Mnangagwa seront observées à la loupe. Il pourrait notamment s'entourer de militaires, comme il l'a fait au gouvernement où il a choisi des généraux pour les ministères des Affaires étrangères et de l'Agriculture.
"Beaucoup de gens considèrent ce gouvernement comme un fin vernis sur une junte militaire, la question est de savoir si le vernis va être plus mince ou plus épais", a résumé à l'AFP l'avocat et opposant David Coltart.
L'armée a déjà reçu un cadeau très apprécié à l'approche de Noël.
Comme la plupart des fonctionnaires, ses soldats vont être payés d'ici au 21 décembre, une première en trois ans selon le quotidien d'Etat The Herald. Ces derniers mois, l'Etat, faute de liquidités, versait régulièrement les salaires avec retard.
Avec AFP