Les Américains, divisés sur le plan de sauvetage du secteur financier

A un mois environ des élections présidentielle et législatives du 4 novembre, les réactions de l’électorat sont mitigées face au rejet lundi, par la Chambre des représentants, du plan de sauvetage du secteur financier proposé par l’administration Bush. Nombre de députés ont voté contre la mesure, dont le coût a été chiffré à 700 milliards de dollars, après avoir été bombardés d’appels téléphoniques, télégrammes ou e-mail d’électeurs qui y étaient opposés.

Le Sénat se penche sur le projet en vue d’un voe prévu ce soir. Les sondages montrent qu’en général, les jeunes Américains sont plus optimistes que leurs parents, même si toutes les générations conviennent que la situation est grave, et nécessite des mesures immédiates.

« Je ne suis pas an colère. Je suis dégoûté par cette situation. Je pense qu’elle a été mal gérée » explique Archie Simpson, un retraité âgé de 88 ans qui, avec son épouse Roberta, réside dans la banlieue de Washington, la capitale. Certes, il faudra faire quelque chose, reconnaît-il, mais il est vraiment mécontent.

Ancien combattant de la Seconde guerre mondiale, Simpson a passé 30 ans au sein des US Marines avant de travailler comme courtier. Son épouse et lui dépendent de la retraite que lui verse le Pentagone, mais aussi de son portefeuille d’actions qui a perdu 40% de sa valeur avec la chute des parts à Wall Street et sur les autres places boursières à travers le monde.

« L’avarice est ce qui me tracasse le plus. C’est l’avarice. C’est le fait que les gens tentent d’amasser trop d’argent, sans faire leur travail, sans supervision. Ou que ceux qui étaient chargés de la supervision n’ont pas fait leur travail », affirme le retraité.

Pour sa part, Mme Simpson se dit contre le plan de sauvetage du secteur financier. Enfant, elle a connu la grande dépression des années 1930. Ses parents lui ont appris à travailler dur et à régler ses dépenses ; des valeurs morales qui lui ont été bien utiles tout au long de sa vie.

« Je pense qu’ils accordaient des hypothèques à des gens qui ne pouvaient pas verser un sou d’acompte et ne payaient que les intérêts. Je n’arrive pas à croire que cela puisse arriver de nos jours. C’est surréel », déclare Mme Simpson. Il faudrait protéger les contribuables qui ne vivent pas au-dessus de leurs moyens, ajoute-t-elle. Si plan de sauvetage il y a, il ne devrait s’appliquer qu’aux gens responsables. Il ne faudrait quand même pas qu’on alourdisse la fiscalité pour aider ceux qui ont commis des erreurs et acheté des logis au-dessus de leurs moyens. « Ça me met en rogne », explique la retraitée.

Par contre Lee Mitchem, 31 ans, une ancienne employée du secteur financier qui poursuit actuellement des études supérieures à l’Université John’s Hopkins ici à Washington, est moins pessimiste. Elle investit en bourse depuis son adolescence, et pense que la crise pourrait offrir de belles opportunités. En achetant bon marché les avoirs de banques menacées de faillite, le gouvernement pourrait réaliser une bonne affaire, lorsque les marchés retrouveront leur équilibre, explique-t-elle.

« Le gouvernement pourrait gagner des sommes énormes. Il pourrait peut-être même éliminer une bonne partie de la dette publique, si les marchés repartent en hausse » estime cette ancienne employée du secteur financier. Même une flambée éventuelle de l’inflation ne la décourage pas, car le coût réel des emprunts qu’elle a fait pour financer sa maîtrise en serait réduit.

La hausse du chômage pourrait néanmoins mitiger son optimisme. Aujourd’hui, le cabinet de conseil Challenger, Gray & Christmas a annoncé que les entreprises américaines projetaient de licencier plus de 95 000 personnes en septembre, soit un tiers de plus que durant la même période en 2007. On devrait en savoir plus vendredi lorsque le département américain du Travail publiera ses derniers chiffres sur l’emploi. Les économistes pensent que le taux de chômage plafonnera à 6,1%, soit une perte de 100 000 emplois à travers le pays.