A Bangui, on remercie les Russes d'avoir "sauvé" la Centrafrique

Malgré les exactions de certains mercenaires russes, la population de Bangui est reconnaissante envers Moscou. (AFP)

Face à une rébellion menaçante il y a plus d'un an, le président centrafricain avait appelé Moscou à la rescousse, entraînant l'arrivée sur place de centaines de paramilitaires russes.

Au pied d'une statue figurant des combattants russes qui protègent une femme et ses enfant, une centaine de personnes ont participé à Bangui à une cérémonie d'hommage de l'armée pour dire "merci" aux paramilitaires russes qui combattent les rebelles à ses côtés d'avoir "sauvé" la Centrafrique.

Le "monument des Russes", comme le nomment les Banguissois, trône sur une place en terre battue en plein coeur de la capitale, près de l'université, où une centaine de personnes de tous âges sont venus mercredi agiter des drapeaux russes et centrafricains devant des soldats d'une unité d'élite au garde-à-vous et de personnalités proches du pouvoir.

Face à une rébellion menaçante il y a plus d'un an, le président Faustin Archange Touadéra avait appelé Moscou à la rescousse de son armée démunie et mal entraînée et des centaines de paramilitaires russes étaient venus s'ajouter à de nombreux autres présents depuis trois ans. En quelques mois, ils avaient repoussé les groupes armés qui occupaient alors deux tiers du pays et récupéré la grande majorité du territoire.

Mais au prix de nombreuses violations des Droits humains par des "mercenaires" de la compagnie russe de sécurité privée Wagner selon l'ONU, de "massacres" et d'"exécution" de civils ont accusé la France et les Etats-Unis mardi.

Inauguré en grande pompe en décembre par le président Touadéra en "hommage aux forces armées et aux combattants russes", la statue ne porte aucune inscription. Moscou ne reconnaît avoir dépêché en Centrafrique depuis quatre ans que des "instructeurs non armés" pour former ses soldats.

Les gens brandissaient des banderoles et des pancartes proclamant notamment: "Les Centrafricains avec la Russie", ou bien encore "La Russie sauvera le Donbass de la guerre", en référence à ce territoire séparatiste pro-russe de l'est de l'Ukraine, dont l'indépendance autoproclamée lundi a été reconnue immédiatement par Moscou et dont la protection a été invoquée par le président Vladimir Poutine pour déclencher jeudi une attaque contre Kiev.

Des t-shirts "Je suis Wagner"

"Les Russes sont venus et ont fait un travail remarquable pour libérer le peuple centrafricain", s'enthousiasme Blaise-Didacien Kossimatchi, membre de la Plate-Forme de la Galaxie Nationale, une des associations qui organisaient l'hommage et qui vilipendent régulièrement la France, l'ancienne puissance coloniale, et l'ONU.

"Les Russes ont toujours été là, de notre côté", renchérit Yefi Kezza, membre de Galaxie Nationale mais aussi du Mouvement Coeurs Unis (MCU), le parti au pouvoir de M. Touadéra.

Plusieurs manifestants arboraient des t-shirts estampillés "Je suis Wagner".

Les hommes du 6e bataillon d’Infanterie territoriale, une unité d'élite des Forces armées centrafricaines (FACA) qui a combattu les rebelles aux côtés des paramilitaires russes, se sont ensuite alignés au garde-à-vous à l'entame de l’hymne national centrafricain. Leur commandant a déposé une gerbe au pied de la statue en hommage aux "Défenseurs de la Patrie".

Aucun des diplomates ou cadres des paramilitaires russes qui assistent d'ordinaire à ces cérémonies n'était visible.

"La paix que les FACA et les Russes nous ont apportée, c’est véritablement la paix de Dieu", lance un homme au micro, acclamé par la foule.

"Ce qui nous intéresse, c’est d’avoir la vraie paix, il faut que les Russes donnent encore un coup de main à la Centrafrique", plaide aussi Nelson Ezechiel Yangelema, étudiant en première année de faculté de Science.

Mardi, la France et les Etats-Unis ont accusé pour la première fois au Conseil de sécurité de l'ONU les "mercenaires de Wagner" d'avoir "massacré" et "exécuté" des dizaines de civils en janvier. Ce qu'une diplomate russe a aussitôt démenti, accusant Paris et Washington de tenter de "discréditer" les "spécialistes" russes présents en Centrafrique.

En 2021, un groupe d'experts de l'ONU avait déjà dénoncé des exactions commises contre des civils par les FACA et leurs alliés russes, évoquant des "violations des droits humains".