Les Sud-Africains voteront le 29 mai pour renouveler leur Parlement, qui choisira le prochain président. Jacob Zuma, 81 ans, était candidat sur la liste du parti récemment créé baptisé Umkhonto We Sizwe (MK, lance de la nation en zoulou).
L'ancien pilier du Congrès national africain (ANC), au pouvoir depuis trente ans, avait créé la surprise en décembre en annonçant soutenir le petit mouvement radical, au moment où l'ANC craint de perdre pour la première fois sa majorité parlementaire à l'issue des élections.
Traitant régulièrement les membres de l'ANC de "traîtres", l'ennemi politique du président Cyril Ramaphosa a répété ne plus "reconnaître le parti" au sein duquel il a lutté contre l'apartheid, et appelé publiquement à "reprendre le pays" en rejoignant les rangs du MK. Mais jeudi, la commission électorale (IEC) a invalidé la candidature de M. Zuma. Elle n'a pas clairement expliqué les motifs, déclarant seulement avoir reçu "une objection qui a été retenue".
Lire aussi : L'ex-président Jacob Zuma exclu des prochaines élections sud-africainesLa commission a dans la foulée rappelé les conditions d'éligibilité d'un candidat selon la Constitution, soulignant notamment qu'une personne condamnée à une peine de prison supérieure à 12 mois ne peut pas se présenter. Or Jacob Zuma, poursuivi dans plusieurs affaires de corruption, a été condamné à 15 mois de prison pour outrage en 2021.
M. Zuma "n'a pas été inculpé pénalement et n'a pas fait l'objet d'une procédure pénale", a fait valoir le MK dans son recours déposé auprès de la Cour électorale et dont l'AFP a obtenu copie. Remettant en cause l'impartialité de la commission électorale, le parti estime que l'affaire qui a valu la prison à M. Zuma est une "procédure civile".
Il rappelle par ailleurs qu'incarcéré en juillet 2021, Jacob Zuma a bénéficié d'une libération conditionnelle pour raison de santé après un peu plus de deux mois. "Le président Ramaphosa lui a accordé une remise de peine, réduisant ainsi sa peine finale", affirme le MK.
"Ca sera l'anarchie"
Les élections s'annoncent tendues pour l'ANC en perte de vitesse en raison de multiples scandales et de son incapacité à relever une économie en panne. Selon les derniers sondages, le parti historique remporterait un peu plus de 40% des voix, contre quelque 27% pour le premier parti d'opposition l'Alliance démocratique (DA) et 13% pour le MK. L'ANC perdrait ainsi, pour la première fois, sa majorité parlementaire et pourrait se retrouver contraint à former un gouvernement de coalition.
Ces dernières semaines, la tension est montée entre l'ANC et le MK. Le parti au pouvoir a tenté de faire rayer le mouvement des listes des partis enregistrés pour le scrutin, mais la justice a la semaine dernière rejeté le recours, jugé insuffisamment argumenté.
Lire aussi : L'Afrique du Sud organisera ses élections le 29 maiL'ANC a déposé un autre recours réclamant que le parti de Jacob Zuma change de nom et de logo, dénonçant un "vol de propriété intellectuelle et de patrimoine". MK est à l'origine le nom de la branche armée de l'ANC pendant la lutte contre le régime blanc. Le tribunal doit rendre sa décision dans les prochains jours.
Des déclarations virulentes de membres du MK ont récemment provoqué l'inquiétude des autorités. "Si ces tribunaux, qui sont parfois +contrôlés+, mettent un coup d'arrêt au MK, ça sera l'anarchie dans le pays. Il y aura des émeutes comme vous n'en avez jamais vu", a averti Visvin Reddy, un haut responsable du parti, dans une vidéo largement partagée sur les réseaux sociaux.
L'incarcération de Jacob Zuma en 2021 avait été suivie d'une vague d'émeutes et de pillages sans précédent dans le pays depuis la fin de l'apartheid en 1991, faisant plus de 350 morts. Les listes électorales définitives doivent être publiées la semaine prochaine.