Afrique du Sud: l'état de catastrophe peut-il résoudre la crise énergétique?

l'Afrique du Sud a décrété jeudi soir l'état de catastrophe nationale pour endiguer la grave crise de l'électricité qui plombe le pays mais la portée de cette mesure exceptionnelle reste encore floue.

Un ministre de l'Electricité et des financements: l'Afrique du Sud a décrété jeudi soir l'état de catastrophe nationale pour endiguer la grave crise de l'électricité qui plombe le pays mais la portée de cette mesure exceptionnelle reste encore floue.

La première puissance industrielle du continent manque d'électricité. Depuis des mois, 60 millions de Sud-Africains sont soumis à des coupures quotidiennes programmées, jusqu'à onze heures certains jours, les pénuries s'étant aggravées depuis l'an dernier.

Lire aussi : Les coupures de courant menacent la production alimentaire sud-africaine

Après des semaines de spéculation, le président Cyril Ramaphosa a attendu son discours annuel sur l'état de la Nation, retransmis à la télévision, pour déclarer l'état de catastrophe nationale avec effet immédiat.

Le dispositif permet principalement de débloquer des fonds exceptionnels. Le chef d'Etat a évoqué un soutien aux entreprises du secteur alimentaire, particulièrement touchées par les coupures de courant, et la possibilité pour les hôpitaux et les stations de traitement d'eau d'être épargnés par les délestages.

Mais pour l'instant, "il est difficile d'évaluer ce qui pourrait se passer car nous ne savons pas vraiment ce que cet état de catastrophe implique", a expliqué à l'AFP l'expert des questions d'énergie Ted Blom. Le premier objectif est de réduire l'intensité des coupures "dans les mois à venir" et à terme d'y mettre fin, a promis le président.

Le mois dernier, la compagnie publique d'électricité Eskom a évoqué la possibilité de délestages continus pendant les deux à trois prochaines années pour remettre à niveau ses centrales à charbon vieillissantes et mal entretenues.

- Ministre de l'Electricité -

Un ministre de l'Électricité rattaché à la présidence doit aussi être nommé, alors que ce dossier est actuellement partagé entre le ministère de l'Energie et celui des Entreprises publiques.

Ce nouveau poste ministériel n'est qu'"une nouvelle couche bureaucratique" qui coûtera près de 2 millions d'euros par an aux contribuables (37 millions de rands), a fustigé dans un communiqué le premier parti d'opposition, l'Alliance démocratique (DA).

Le parti appelait pourtant depuis plusieurs mois à déclarer l'état de catastrophe, accusant le gouvernement d'inaction. Mais quelques minutes après l'annonce du président jeudi, le DA a annoncé contester en justice la décision "dangereuse et désespérée de Ramaphosa".

Un tel dispositif représente une porte ouverte pour l'ANC au pouvoir (Congrès national africain) "de piller sans entrave et sans aucun contrôle parlementaire" les fonds débloqués, avance le DA, faisant référence aux affaires de malversations pendant l'état de catastrophe lié au Covid.

Plusieurs milliers de contrats publics pour une valeur de 830 millions d'euros dans le cadre de la lutte contre la pandémie font l'objet d'enquêtes pour fraude et corruption en Afrique du Sud.

"L'état de catastrophe pourrait être un bon outil" pour mettre rapidement fin aux coupures de courant, si le gouvernement agit "de manière responsable", estime toutefois Mark Swilling, de la School of public leadership de Stellenbosch.

La crise de l'électricité est issue en grande partie d'années de mauvaise gestion et de corruption à tous les étages. Eskom a été une des cibles du pillage généralisé des ressources de l'Etat sous la présidence de Jacob Zuma (2009-2018).

Aujourd'hui, l'entreprise qui produit 90% du courant du pays est prise à la gorge par une dette de près de 21 milliards d'euros (400 milliards de rands) que le gouvernement tente d'éponger et des centrales régulièrement en panne.