Prison ferme pour huit "terroristes" anti-réfugiés en Allemagne

Michael Neuhaus (à gauche) et Joern Hausschild, représentants du procureur fédéral, à l'ouverture du procès à Dresde, en Allemagne, où des membres du «groupe Freital» ont été jugés le 7 mars 2018.

Huit membres d'un groupuscule d'extrême droite allemand ont été condamnés à des peines de quatre à dix ans de prison pour des attaques jugées "terroristes" contre des réfugiés en 2015, en pleine crise migratoire.

Le tribunal de Dresde, dans l'est de l'Allemagne, a estimé que les accusés, sept hommes et une femme âgés aujourd'hui de 20 à 40 ans, étaient les membres "d'une organisation terroriste", le "Groupe Freital" du nom de cette localité de Saxe où ont eu lieu la plupart des attaques.

Les accusés, dont l'engagement politique varie "de simple sympathisants à ceux ayant une posture extrémiste nationale-socialiste prononcée", ont agi "avec une brutalité croissante", a expliqué le président du tribunal Thomas Fresemann.

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Plusieurs accusés avaient reconnu les faits et s'étaient excusés, tout en rejetant le qualificatif de terrorisme.

Le cerveau supposé du groupe, Timo Schulz, un conducteur de bus qui s'est tu pendant le procès, a été condamné à la peine la plus lourde, 10 ans de détention.

Patrick Festing, un livreur de pizza devenu l'expert en explosif du groupuscule, s'était dit "désolé" au procès mais il a tout de même été condamné à neuf ans et demi de réclusion.

La seule femme, Maria Kleinert, s'est vu infliger de son côté une peine de cinq ans et demi.

Le parquet avait requis cinq à onze ans de prison contre les huit accusés pour "constitution d'une entreprise terroriste", "tentative de meurtre" et "blessures corporelles" après cinq attentats à l'explosif menés entre juillet et novembre 2015 contre des foyers de réfugiés et des militants de gauche.

Par chance, un seul demandeur d'asile avait été blessé lors de cette série d'attaques menée au pic de l'afflux de plus d'un million de migrants enregistré par l'Allemagne en 2015 et 2016.

Le groupe avait également plastiqué la voiture d'un élu du parti de gauche radicale Die Linke.

Outre ces premières condamnations, le parquet de Dresde poursuit son enquête concernant dix autres personnes qui pourraient être liées au "Groupe Freital", selon la chaîne publique régionale MDR. Parmi elles, deux pourraient être impliquées dans le plasticage de la voiture.

"Ils ont voulu créer un climat de peur et de violence", a martelé durant le procès le procureur Jörn Hauschild. "Ceux qui ont des opinions différentes devaient être intimidés et les étrangers poussés à quitter le territoire", avait ajouté le magistrat.

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Selon l'accusation, les extrémistes de droite étaient parfaitement conscients du risque létal de leurs actions.

Les faits se sont tous déroulés en Saxe, berceau du mouvement islamophobe et anti-réfugiés Pegida qui était alors l'épicentre de l'hostilité aux migrants. Et Freital faisait alors les gros titres pour ses manifestations houleuses, émaillées de slogans racistes et de saluts hitlériens.

Ironie de cette affaire, le procès s'est tenu sous haute surveillance dans une salle spéciale aménagée dans un bâtiment qui devait accueillir des réfugiés.

Les membres du groupe étaient soudés par leur xénophobie, selon l'accusation. Si leurs avocats n'ont pas contesté les faits, ils rejetaient toute intention terroriste, affirmant que les attaques étaient "spontanées".

Schulz et Festing avaient été arrêtés fin 2015. Le premier a déjà été condamné à une peine de prison avec sursis en 2016 pour avoir frappé à coups de batte de baseball la voiture de manifestants pro-réfugiés. Le reste du groupe avait été interpellé en avril 2016.

Dans le sillage de l'arrivée de centaines de milliers de demandeurs d'asile, les attaques contre les réfugiés ou les foyers de demandeurs d'asile se sont multipliées en Allemagne.

En 2017, 2.219 attaques contre les réfugiés ou des foyers de demandeurs d'asile ont été recensées, en baisse néanmoins par rapport aux 3.500 enregistrées en 2016.

Dans le seul Etat-région de Saxe, qui représente 5% de la population allemande, l'association d'aide aux victimes RAA a dénombré 437 agressions racistes en 2016 après 477 en 2015.

C'est aussi dans cette région, où le parti d'extrême droite Alternative pour l'Allemagne (AfD) enregistre ses scores les plus élevés, qu'un groupuscule néo-nazi, NSU, fut créé à la fin des années 1990 et assassina durant plusieurs années des immigrés dans tout le pays.

Avec AFP