L'Angola, la grande aventure africaine de Fidel Castro

Fidel Castro montre à un leader du parti MPLA Agostinho Neto comment boire un daikiri, une boisson glacée cubaine, à La Havane, le 28 juillet 1976.

Les dirigeants de nombreux pays africains ont rendu un hommage appuyé au "comandante" Fidel Castro. Mais s'il en est un dont le sort est, plus que les autres, lié soutien politique et militaire du dirigeant cubain, c'est bien l'Angolais José Eduardo Dos Santos.

Pendant un quart de siècle, son pays a été le théâtre du plus grand affrontement africain de la période de la Guerre froide, dans lequel le régime castriste a tenu l'un des rôles principaux.

Au plus fort de la guerre civile qui a déchiré l'Angola entre 1975 et 2002, Cuba y a déployé jusqu'à 50.000 de ses soldats. Ils ont porté à bout de bras le Mouvement populaire de libération de l'Angola (MPLA), qui dirige l'ex-colonie portugaise depuis son indépendance en 1975. Plus 4.300 ont perdu la vie.

A la tête du pays depuis 1979, le chef du MPLA et président José Eduardo Dos Santos, 74 ans, s'est dit "consterné" par la disparition de Fidel Castro.

Dans une déclaration aux accents très révolutionnaires, il a salué une "figure historique et transcendante". Surtout, il a rappelé la "contribution inoubliable de son pays (...) à la défense, au maintien de la souveraineté et de l'intégrité territoriale de l'Angola".

Pendant la guerre civile, Cuba, soutenu par l'Union soviétique, est le principal soutien du MPLA. Les deux autres mouvements de rébellion qui l'affrontent, le FNLA et l'Unita, sont soutenus par les Etats-Unis, l'Afrique du Sud, les Européens et même la Chine.

"L'Angola a été le terrain de confrontation des superpuissances de la Guerre froide", résume la chercheuse Paula Roque, de l'université d'Oxford (Grande-Bretagne), "les Cubains ont joué un rôle déterminant dans la guerre".

L'intervention cubaine connaît son apogée lors de la bataille de Cuito Cuanavale. En janvier 1988, plusieurs milliers de militaires cubains sont engagés, aux côtés de soldats angolais, contre l'armée sud-africaine. C'est la plus importante bataille qui se déroule sur le sol africain depuis la Seconde guerre mondiale.

Grandes ambitions

La légende veut que, pendant la bataille, Castro téléphonait lui-même ses ordres à ses officiers engagés à plus de 14.000 kilomètres de La Havane.

"Les Cubains ont boxé largement au-dessus de leur catégorie", poursuit Mme Roque, "ils n'étaient alors qu'une petite île mais ils avaient de grandes ambitions en Angola".

L'affrontement, féroce, s'achève sans réel vainqueur militaire. Mais il aboutit à l'indépendance de la Namibie, alors sous mandat sud-africain, que Pretoria finit par accepter en échange d'un retrait des forces cubaines de l'Angola.

Deux ans plus tard, Nelson Mandela sort de prison et l'Afrique du Sud commence à tourner la page de l'apartheid.

La bataille de Cuito Cuanavale "fut le moment décisif de la libération de l'Afrique australe", a souligné samedi le président namibien Hage Geingob en rendant hommage à Fidel Castro.

Outre l'Angola et la Namibie, Cuba a également prêté main forte au Frelimo dans les guerre d'indépendance et civile qui ont ensanglanté le Mozambique.

"La réalité, c'est qu'il existe un lien inextricable entre Cuba et le combat pour la libération de l'Afrique australe", rappelle Mac Maharaj, un vétéran du Congrès national africain (ANC) compagnon de détention de Nelson Mandela. "Fidel est devenu une source d'inspiration pour notre combat".

Cuba fut d'ailleurs un des premiers pays visités par Nelson Mandela dans l'année qui suivit sa libération.

Et l'évocation du nom de Fidel Castro a reçu "les applaudissements les plus nourris" lors de la cérémonie d'investiture du nouveau président Nelson Mandela en 1994, se souvient un des compagnons de route du premier chef d'Etat noir du pays, Ahmed Kathrada. "Sa popularité en Afrique du Sud était indéniable", raconte-t-il.

Presque trois décennies après la fameuse bataille de Cuito Cuanavale, la présence cubaine reste forte en Angola. Près de 42% des médecins du pays sont Cubains, dont certains restés après la guerre.

Avec AFP