Au bout du suspens, l'ex-putschiste Assoumani vainqueur de la présidentielle aux Comores

Azali Assoumani donne un discours à ses partisans pendant un meeting de la campagne présidentielle à Moroni, aux Comores, le 24 janvier 2016.

L'ex-putschiste et ancien président Azali Assoumani a été élu chef d'Etat des Comores à l'issue d'une élection présidentielle partielle aux allures de troisième tour où il a conforté son avance acquise au deuxième tour, selon des résultats provisoires rendus publics.

Le colonel Assoumani a obtenu 2.271 voix, contre 1.308 pour son rival, le candidat du pouvoir sortant, le vice-président Mohamed Ali Soilihi dit "Mamadou", a annoncé Nadjahe Allaoui, vice-présidente de la commission électorale nationale indépendante (Ceni).

Les résultats provisoires de cette partielle "devront s'ajouter aux résultats" du deuxième tour du 10 avril, où le colonel Azali était arrivé en tête, a-t-elle ajouté au petit matin depuis un hôtel gardé par les forces de sécurité, à Mutsamudu, la capitale de l'île comorienne d'Anjouan.

"J'éprouve une grande satisfaction", a réagi jeudi à l'AFP le colonel Assoumani, qui a déjà occupé la fonction suprême de 1999 à 2006.

Lors du scrutin mercredi, "nous craignions des débordements et des incidents, mais tout s'est bien passé. Les forces de sécurité ont bien rempli leurs fonctions", a-t-il ajouté.

Le camp "Mamadou" s'est lui refusé à commenter les résultats provisoires. "Nous restons très confiants", a déclaré à l'AFP un porte-parole du candidat, Saïd Larifou. "Nous respectons nos institutions. Nous laissons à la Cour constitutionnelle le soin de donner les résultats définitifs de ce scrutin", a-t-il ajouté.

La Cour constitutionnelle, qui peut être saisie de recours, a cinq jours pour proclamer les résultats définitifs. Le nouveau président doit être investi le 26 mai.

La partielle de mercredi, organisée dans 13 bureaux de vote sur l'île d'Anjouan, avait été convoquée à la suite d'incidents qui avaient empêché quelque 6.300 électeurs d'exercer leur droit de vote.

Ce nouveau scrutin, inédit aux Comores, était décisif pour déterminer le vainqueur de la présidentielle puisque le colonel Assoumani avait seulement 2.000 voix d'avance sur "Mamadou" au terme du deuxième tour.

Il s'est déroulé dans le calme mais sous haute sécurité, avec le déploiement de 200 militaires à proximité des bureaux de vote.

Gaz lacrymogène

Mercredi soir, la Ceni avait indiqué dans un premier temps qu'elle ne communiquerait pas de résultats provisoires, laissant à la Cour Constitutionnelle le soin de donner les résultats définitifs.

Elle a finalement changé d'avis sous la pression de manifestants pro-Assoumani, qui avaient été dispersés quelques heures plus tôt, en pleine nuit, à coups de grenades lacrymogènes par les forces de l'ordre.

Les manifestants, réunis devant l'hôtel où se trouvaient les membres de la Ceni, réclamaient la proclamation de résultats. Le calme est ensuite rapidement revenu à Mutsamudu après l'annonce des résultats provisoires.

Pour l'emporter, le colonel Assoumani a pu compter sur le soutien décisif du charismatique Ahmed Abdallah Sambi, ex-chef d'Etat et président d'honneur du principal parti d'opposition Juwa, très populaire à Anjouan.

Azali Assoumani, un officier de 57 ans formé à l'Académie royale de Meknes au Maroc et passé par l'Ecole de guerre en France, retrouve le palais présidentiel de Beït-Salam pour la seconde fois.

La première fois en avril 1999, il était arrivé aux commandes par un putsch qu'il présentera a posteriori comme une interposition de l'armée pour prévenir une guerre civile, alors que le pays traversait une crise sécessionniste (1997-2001). Il restera au pouvoir jusqu'en 2006 avant de le céder démocratiquement à Ahmed Abdallah Sambi, nouvellement élu.

Il cite souvent à son actif l'adoption de la nouvelle Constitution qui a stabilisé les Comores et la création de l'Université des Comores.

Ses détracteurs ne ratent pas une occasion de rappeler un fait d'armes peu glorieux. En 1995, lors d'un affrontement armé avec une dizaine de mercenaires conduits par le Français Bob Denard, Azali Assoumani avait abandonné ses hommes pour se réfugier à l'ambassade de France à Moroni.

Ses opposants brocardent également son attitude jugée accommodante à l'égard de Paris sur le différend qui oppose la France et les Comores sur Mayotte, la quatrième île des Comores devenue le 101e département français, mais toujours revendiquée par Moroni.

Avec AFP