Evoquant les mêmes événements, le gouvernement de Bamako a indiqué que l'armée avait découvert "16 corps" après un "accrochage violent" entre communautés du village de Koumaga, dans le cercle de Djenné (région de Mopti, centre).
"Ce sont des dozos, des gens habillés en dozos, qui sont arrivés à Koumaga. Ils ont encerclé le village, isolé les Peuls des autres communautés et, froidement, ils ont tué au moins 32 civils. Dix autres sont portés disparus", a déclaré à l'AFP Abel Aziz Diallo, le président de Tabila Pullaku, principale association peule au Mali.
Les violences se multiplient depuis trois ans dans le centre du Mali entre Peuls, traditionnellement éleveurs, et les ethnies bambara et dogon, pratiquant majoritairement l'agriculture. Appelés "dozos" en Afrique de l'Ouest, les chasseurs traditionnels sont, dans le centre du Mali, membres de l'ethnie dogon.
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Les Peuls dénoncent régulièrement des exactions à leur encontre, au nom de la lutte contre les jihadistes, de la part de ces chasseurs armés, tolérés voire encouragés selon eux par les autorités ou l'armée, ce que dément le gouvernement.
"Les hommes étaient habillés en tenue de dozos, mais on se demande s'ils étaient tous dozos. Il y a des dizaines de civils, dont des enfants, tués", a déclaré un élu de la région.
"Malgré le déploiement des missions de patrouille dans le centre du pays, dans la matinée du 23 juin, un accrochage violent a opposé des communautés" de ce village, a indiqué le gouvernement dans un communiqué.
"Une mission FAMa (Forces armées maliennes) d'interposition dépêchée sur les lieux a découvert 16 corps et d'importants dégâts matériels", ajoute le gouvernement, en promettant que "des poursuites judiciaires seront engagées contre tous ceux qui seraient impliqués dans cet incident malheureux".
'Fosses communes'
Ces derniers mois, les annonces par l'armée de la "neutralisation de terroristes" dans le centre ont souvent été contestées par les organisations de défense des droits de l'homme et par des habitants, qui dénoncent des exécutions extrajudiciaires.
"Ce qui se passe est très grave. Il faut éviter les amalgames. Ce n'est pas parce qu'on est peul qu'on est jihadiste", a déclaré dimanche Abdel Aziz Diallo. Il assure avoir prévenu les autorités de l'imminence d'une attaque et regrette que "c'est seulement après les faits que l'armée malienne s'est rendue brièvement sur les lieux".
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Les Etats-Unis ont par ailleurs demandé jeudi au Mali de mener une enquête "crédible et transparente" après la découverte récente des corps de 25 personnes, issues également de la communauté peule, dans trois fosses communes dans la région de Mopti et la reconnaissance, par le gouvernement de Bamako, de l'implication de "certains personnels" de l'armée.
'Crimes odieux'
Le Canada, qui vient tout juste d’entamer le déploiement de quelque 250 Casques Bleus au Mali, selon le ministère canadien de la défense, s'était également dit "profondément préoccupé" par l'implication présumée de militaire dans des exactions et réclamé que les "responsables de ces crimes odieux soient traduits en justice".
Le président malien, Ibrahim Boubacar Keïta, a insisté vendredi, lors d'un conseil de Défense, sur "le respect des droits de l'homme par l'ensemble des militaires". Le Premier ministre Soumeylou Boubeye Maïga doit quant à lui entamer lundi une visite en France, à un mois de l'élection présidentielle du 29 juillet.
Le nord du Mali était tombé en mars-avril 2012 sous la coupe de groupes jihadistes liés à Al-Qaïda, en grande partie chassés ou dispersés par une intervention militaire lancée en janvier 2013 à l'initiative de la France, qui se poursuit actuellement.
Malgré un accord de paix signé en mai-juin 2015, les violences ont persisté et se sont propagées depuis vers le centre et le sud du pays, puis au Burkina Faso et au Niger voisins
Avec AFP